Il y a fort à parier qu’une bonne partie des lecteurs de Goûte Mes Disques compte La Vague Parallèle parmi ses points de chute favoris pour faire de jolies découvertes. Et il y a fort à parier que l’inverse est tout aussi vrai. Et parce qu’il vaut mieux collaborer plutôt que se concurrencer, GMD et LVP ont réuni leurs cerveaux les plus brillants pour sélectionner dans la programmation du Dour Festival ces choses vers lesquelles vous n’iriez peut-être pas naturellement – oui, on a le sentiment qu’on ne mériterait pas votre confiance (et notre accréditation presse) si on vous disait qu’il ne faut surtout pas rater Orelsan et Aphex Twin. Bref, il vous reste quelques jours pour prendre votre place et vous familiariser avec ces 12 noms qui, cerise sur le ghetto, ne sont jamais programmés en même temps.
LES CHOIX DE LVP
yunè pinku | Jeudi 13.07 / 21h15 - 22h15 | garage-pop-electro
On commence avec de l’electro-chill, car oui, il faut vous garder des points de vie pour pouvoir survivre durant 5 jours de teuf et pétage de tympans. Puisqu’on fait attention à vous, on vous propose d’aller vous poser devant yunè pinku dont l’electronica-breakbeat s’agrémente d’une voix aérienne qui sera définitivement salvatrice. On avait déjà pu voir la Malaiso-Irlandaise aux Nuits Botanique, pour un set extrêmement pointu et extrêmement pop à la fois. Le combo est plutôt très accrocheur et facile d’accès mais avec cette petite étincelle alternative qui a son importance pour de la club music. On y ajoute des visuels dans la veine hyperpop faits de dragons métalliques et autres créatures, symboles presque tribaux (alerte années 2000) mais aussi des étoiles de lancer (ndlr : ces petits objets métalliques pointues qu’on voit dans les films, lancés sur des adversaires en plein combat).
Baby Volcano | Vendredi 14.07 / 16h35 - 17h15 | latino-electro-trap
Vous détestez les personnes unidimensionnelles ? Alors vous allez adorer Baby Volcano. En effet, cette dernière a tellement de cordes à son arc qu’on pourrait en faire une harpe... À la fois danseuse, chanteuse et couturière, La jeune artiste suisso-guatemaltèque est récemment apparue sur nos radars avec l’EP Síndrome Premenstrual. Elle y dévoile un spectre d’expression impressionnant passant du punk à la pop avec autant d’aisance qu’elle passe du français à l’espagnol. En ressort un projet profondément organique inspiré par la nature et le corps. Assurément un des joyaux cachés de cette programmation qui ne manquera pas de déployer tout son potentiel scénique devant vos yeux ébahis !
∑tella | Samedi 15.07 / 15h30 - 16h15 | indie rock - pop
Malgré son célèbre slogan, qu’on oserait jamais remettre en question, on est bien placé·es pour savoir à quel point, Dour peut aussi être synonyme de violence. Pour nos pieds, pour nos oreilles, pour notre foie... bref pour notre pauvre corps vieillissant auquel on inflige cinq jours d’excès au nom de l’amour. Fort heureusement, des remèdes existent, comme la présence de Σtella au line-up 2023. En effet, si le premier album de la Grecque lorgnait du côté d’une electro pop relativement pêchue, son nouvel effort perd en synthés et en bpm ce qu’il gagne en guitares cristallines et caisses claires dopées à la reverb. Le tout, agrémenté de touches de Qanûn et de Bouzouki pour une sorte de version hellénique de Khruangbin. Ça vous parle ? Alors rendez- vous samedi à l’ouverture de la Last Arena pour un moment de plénitude bien mérité.
Dréya Mac | Dimanche 16.07 / 15h45 - 16h30 | rap uk - afrobeats
Il n’est pas nécessaire de passer des heures sur le cas de Dréya Mac pour comprendre que l’usine à talents bruts qu’est le Royaume-Uni n’est pas prête à fermer boutique. Fidèle au noble héritage des artistes qui ont donné ses lettres de noblesse à la grime, la Londonienne trace son sillon à grands renforts de flows acérés sur basses puissantes. Pour autant, on perçoit chez celle qu’on qualifie déjà de reine queer du rap une capacité à infuser subtilement sa musique d’influences pop et afrobeats. De quoi lui permettre de porter l’étendard de la grime hors de ses frontières, un peu à l’instar de Stormzy avant elle. On espère juste qu’elle ne sera pas obligée de nous infliger un feat avec Ed Sheeran pour y arriver...
Heartworms | Dimanche 16.07 / 16h30 -17h15 | avant-garde post punk
Well, well, well. Que serait une bonne sélection sans un peu de post-punk ? On a l’extrême plaisir de vous présenter Heartworms et sa musique avant-garde-gothic-like, qui n’a pour but que de vous maudire. Pour l’anecdote cocasse, heartworm, c’est une maladie qui atteint les animaux et provoque de multiples défaillances d’organes. Fun. Encore un talent nous venant du Royaume-Uni, prête à tout décimer sur son passage aux moyens d’une cacophonie de riffs sombres et dramatiques pleins de reverb sur un fond électronique et une prose sarcastique qui en fait un bijou d’écriture. On se retrouve au Labo pour une descente aux enfers méritée ?
Yaya Bey | Dimanche 16.07 / 19h45-20h30 | neo soul - r'n'b - reggae
On a le plaisir de vous convier à un moment de groovance extrême pour l’un des derniers concerts de Dour. On ne va pas se mentir, on sait dans quel état vous serez après cinq jours de festival consécutifs donc on est là pour vous aider à vous rétablir. Yaya Bey, c’est notre pépite r’n’b qui dépeint la rupture avec la plus colorée des palettes. Dans son dernier projet, elle parle de la difficulté de naviguer les relations dans ce contexte de misogynoir qu’on connaît. Un statement qui fait réfléchir pour aller avec votre mal de tête du dernier jour de festival : ‘Black women have never seen healthy love or have been loved in a healthy way,’ Parler de ce sujet sur un fond aussi dansant et une prouesse d’écriture pareille c’est presque pas légal – mais on sait que vous aimez ça (wink).
LES CHOIX DE GMD
Living Gate | Jeudi 13.07 / 16h45 - 17h30 | old-school death metal
Fruit d’une collaboration entre des musiciens au pédigré certain, à savoir Wim Coppers (Oathbreaker, Wiegedood), Levy Seynaeve (Wiegedood, Crouch, ex-Amenra), Lennart Bossu (Amenra, Oathbreaker) et Aaron Rieseberg (YOB), Living Gate a quelque peu rebattu les cartes du death metal en Belgique. Deathlust, l’unique EP du groupe sorti sur Relapse en 2020, avait fait forte impression grâce à 5 titres qui traduisent l’attrait du groupe pour les traditions de l’ancienne école mêlées aux expérimentations de la nouvelle. La musique du quatuor va donc chercher ses influences aussi bien chez Morbid Angel ou Suffocation que chez Blood Incantation et ce pour proposer différents angles d’attaque. Aussi direct que technique, aussi crasseux que parfois dissonant, le death de Living Gate sent bon le cuir et la sueur. Et avec un tout nouveau single sous le coude, le groupe qui s’était jusqu’à présent fait plutôt rare sur les scènes ne devrait pas avoir trop de mal à convaincre en ce jeudi à Dour.
LIBERATO | Jeudi 13.07 / 22h15 - 23h15 | electro-pop-trap
Immense phénomène anonyme du paysage musical italien, LIBERATO est l'un de ces artistes dont la portée nationale n'a pas encore tout ravagé chez nous. Mais pour combien de temps? Auteur de deux albums et armé de quelques centaines de millions de visionnages sur ses clips, le jeune napolitain masqué retranscrit depuis 2017 les affres de sa ville natale à travers une pop nappée d'électronique qui flirte régulièrement avec un rap mélancolique et autotuné juste comme il faut. Pas forcément éloigné stylistiquement d'une entité comme PNL avec laquelle le jeune chanteur semble partager le même goût du mystère et le même invraisemblable succès, LIBERATO est désormais prêt à quitter la Botte pour aller voir ailleurs. Plusieurs dates de sa toute première tournée européenne ont affiché complet en juin dernier et après avoir assisté à sa performance pleine de ferveur durant l'une des deux dates parisiennes, on s'attend déjà à ce que La Petite Maison Dans La Prairie prenne des airs de stade Diego-Maradona, enceinte que LIBERATO a par ailleurs récemment investi pour célébrer le Scudetto du Napoli. Au sommet.
H JeuneCrack | Vendredi 14.07 / 16h45 - 17h30 | hip-hop introspectif
Si dans la famille de la nouvelle génération de rimeurs français, vous cherchez le technicien, le comique, le créatif et le génie incompris, alors vous tomberez sur le même faciès imberbe et juvénile : celui de H JeuneCrack. Rappeur, beatmaker et ingé son, ce jeune homme originaire du sud de la France ne se contente pas d'accumuler les casquettes, mais impressionne dans chacune d'entre elles. En tant que rappeur notamment, son aisance technique, déconcertante, créé autant d'espaces pour des introspections que pour des blagues, parfois même les deux en même temps ("les proches, ils sont trop loin/ les gens dans le métro, ils sont trop proches"). Très créatif en tant que beatmaker, les productions de sa dernière mixtape sont des samples de morceaux qu'il a lui-même composé dans le but de jouir de sa propre matière première et de l'utiliser à son gré. On y retrouve ainsi quelques textures électroniques, notamment sur "Au max" et sa vibe house qui promet de nous faire vivre de beaux moments en live. Véritable chaînon manquant entre le côté DIY génial et flegmatique de Orelsan version Perdu d'avance et celui plus cool et assertif de L'Entourage, la musique de H JeuneCrack a un avenir radieux devant elle.
Lambrini Girls | Dimanche 16.07 / 18h00 - 18h45 | punk
Ces 20 dernières années, tandis que le rap n’a pas manqué de jouer son rôle de contre-pouvoir, le (punk) rock a visiblement oublié d’être politique - peut-être était-il trop obsédé par cette fameuse mort imminente qu’on lui promettait? Nous sommes en 2023, et une fois que l’on a sorti le nom des Sleaford Mods de son beau chapeau, et qu’on se rappelle vaguement des postures engagées de Idles il y a cinq ans,, on est bien en mal de citer des formations qui n’ont pas peur de perdre des streams parce qu’elles politisent leur propos. Pour cette raison, et accessoirement parce que musicalement ça défonce, on vous invite à ne pas rater la prestation des Lambrini Girls, girl band originaire de Brighton dont la virulence du propos n’a d’égal que la puissance d’un songwriting qui se vit à l’aune de problématiques queer. Animé d’une envie d’en découdre qui n’est pas sans rappeler les défunts Cocaine Piss et les revenants Be Your Own Pet, le groupe prend un malin plaisir à envoyer chier pas mal de monde - d’ailleurs ce n’est pas un hasard si c’est un bel étron qui illustre You’re Welcome, le seul EP du groupe à ce jour.
Die Klar | Dimanche 16.07 / 22h10 - 23h00 | trance-eurodance
Imaginez un peu : dimanche 16 juillet 2023, plusieurs jours de Dour dans les guiboles, le fond du slip tirant vers le « marron terracotta », un compte en banque à sec et une fatigue digne de la dernière étape du Tour de France. Vous l'aurez compris, ça sent sévèrement le roussi. Pourtant, dans cet épais brouillard, votre lumière pourrait bien être Die Klar. Le dj et producteur parisien à la tête des soirées La Darude et du label Tekno Kawaii dynamite depuis plusieurs annérs les clubs à grands coups d'eurodance, happy hardcore et trance. Il faudra alors jeter vos dernières forces dans la bataille car Die Klar ne vous laissera pas tomber en ce dimanche soir, au pire il vous achèvera. Fervent défenseur des années 90/2000, de ses outrances esthétiques et musicales, le patron de la Darude devrait logiquement aligner les pépites ainsi que les bangers que tu entendais sur Fun Radio dans un torrent d'énergie pour mettre une dernière fois la foule en feu.
SLIFT | Dimanche 16.07 / 17h00 - 17h45 | stoner-psyché
SLIFT fait partie de ces groupes qui vont débarquer à Dour sans rien de nouveau à défendre. En effet, le dernier album en date des Toulousains, Ummon, remonte à 2020. Mais celui-ci était une carte de visite tellement impeccable pour le groupe de stoner / psyché qu’il a bien eu besoin de tout ce temps pour quadriller l’Europe et l’Amérique, et mettre le public à genoux dans des festivals aussi emblématiques que le Levitation ou le Desertfest. À Dour, ceux qui n’ont encore jamais vu les Français pourront se prendre en pleine tronche un show désormais bien rôdé et absolument cataclysmique - on vous conseille de manger léger avant de débarquer, vous ne voudriez pas que l’infâme mitraillette mexicano que vous venez de vous enfiler soit renvoyée à l’expéditeur dès les premières attaques de pédale fuzz. Les fans du groupe eux, pourront espérer deux choses : d’une part que le groupe ait l’audace de flinguer un tiers du temps qui lui est imparti en se lançait dans une interprétation délirante de « Lions, Tigers and Bears », et d’autre part qu’il dévoile l’une ou l’autre composition de son troisième album, dont on pense qu’il devrait sortir fin 2023 / début 2024. Et qu’on attendra de pied très ferme.