Tetra

C2C

Onandonrecords – 2012
par Aurélien, le 5 septembre 2012
4

Dire que Tetra s'est laissé désirer est un doux euphémisme: la première plaque des Nantais de C2C, véritables magiciens du crossfader qui ont enchanté cinq fois les DMC avec leurs routines, est en effet attendue depuis près de trois ans maintenant, un retard à notamment mettre sur le dos de leurs triomphants projets solo, Hocus Pocus et Beat Torrent. Et fatalement, quand le quatuor s'est enfin décidé à dévoiler son projet à huit mains, de surcroît avec un Down The Road EP en béton armé, on a eu tendance à s'enflammer et à ne plus répondre de rien. On s'est même surpris à user de gros mots pour qualifier ce premier opus sur lequel on fantasmait déjà en janvier dernier. Bref, pas grand chose qui laissait a priori augurer de la vertigineuse désillusion qu'est Tetra, produit fini sans réelle saveur ni véritable personnalité, et qui n'a de réellement kawaii que sa pochette multicolore.

Car si l'on attendait que C2C mette tout le monde d'accord avec des pistes moins affaire d'efficacité que d'originalité après un EP bondissant, difficile de ne pas devenir livide devant la désastreuse ''opération séduction'' que dévoile l'album. Oubliées les attachantes maladresses lyricales des raps d'Hocus Pocus ou les relectures électroniques racoleuses de Beat Torrent. Place à un cross-over en équilibre entre ces deux entités qui souffle (peu) le chaud et (trop souvent) le froid avec son tracklisting qui chante tellement fort l'optimisme et la niaiserie qu'il finit par rapidement nous taper sur les nerfs.

En fait, ce n'est pas tellement que la ''pop-à-scratches'' des quatre lurons ne nous inspire aucune sympathie: de chouettes morceaux de bravoure - "The Cell" ou "Happy" pour ne citer qu'eux - arrivent même à faire plutôt bonne figure face à certains plantages navrants que les participations vocales de Pigeon John ou Jay-Jay Johansson peinent à sauver. Non, c'est simplement qu'on a le sentiment que tout à été déjà dit, déjà été fait, et que la musique des Nantais fait le bilan douloureux d'un genre en flagrante perte de vitesse. Et si le talent aux platines n'est plus à remettre en cause, Tetra se révèle être un album daté, calibré pour un public pas trop difficile et doublé d'une impitoyable tête chercheuse de tendances recyclables, qu'elles s'appellent Chinese Man, Daft Punk ou SebastiAn. Au final, rien ne se perd, rien ne se crée, mais surtout tout se transforme bien poliment en superposant des étiquettes, des genres ou des références avec la nette ambition de ne jamais vouloir se les réapproprier.

C'est donc plus proche du virage électronique ouin-ouin de Birdy Nam Nam que des curiosités du Scratch Bandits Crew que la bande à 20Syl à réfléchi ce premier album, lui insufflant cet agaçant doigt de pop qui se fredonne avec tellement d'aisance que le carton de l'album n'est même plus à remettre en cause. Et si l'on est forcément ravis que les natifs de Nantes fassent autant l'unanimité, on aime moins constater la stérilité d'un album qui s'est fait attendre pour accoucher en bout de course d'une poignée de bonnes idées. Ainsi, on ne saurait que trop conseiller aux plus fans de ne pas ranger l'EP histoire de rester en bons termes avec les turntablists. Et puisque Tetra se traduit du grec par ''quatre'', force est de reconnaître qu'ils nous ont un peu facilité la tâche niveau notation... A notre grand dam, d'ailleurs.

Le goût des autres :
3 Thibaut 6 Romain 6 Soul Brotha 5 Maxime 3 Ruben