Selectors 004

Joy Orbison

Dekmantel – 2017
par Aurélien, le 15 novembre 2017
7

Sur "Weak Become Heroes", Mike Skinner aka The Streets évoquait avec nostalgie ses premières soirées en club à la fin des années 80. Vu son âge, Joy Orbison était probablement trop jeune pour aller s'extasier devant Danny Rampling. C'est pourtant sur le patrimoine de la dance music britannique que Peter O'Toole a choisi de jeter son dévolu pour ce quatrième volume des Selectors, belle série initiée par le label amstellodamois Dekmantel.

Une structure qui sait définitivement bien s'entourer, puisque le précédent à s'y être collé n'était autre que Marcel Dettmann, qui s'était fait plaisir en compilant nombre de personal favorites hérités d'une époque où il écoutait davantage de post-punk et d'EBM que de techno. Pour "Joy O", il s'agit de condenser en une douzaine de titres trois décennies de musiques qui ont enflammé les soundsystems de sa Majesté, légaux ou éphémères. Autant dire que le champ lexical invoqué brasse large, de l'âge d'or de la drum aux plus récentes mutations de la bass music.

Et le natif de Croydon ne prend pas l'exercice par dessus la jambe, en proposant une timeline qui va de la fin des années 80 à nos jours. Sincère dans sa volonté d'offrir la photographie la plus transversale possible, cette sélection se repose sur des acteurs secondaires, voire profondément méconnus, et valorise des titres parfois introuvables sur Discogs - et ici, l'Anglais est fidèle à l'esprit de la série. Dans cette course aux pépitos, Joy Orbison n'est pourtant pas dans la démonstration de force. Il faut plutôt voir dans ces choix une volonté de privilégier des titres qui sont tous animés par une espèce de jeunesse éternelle, qu'ils s'articulent autour d'une ligne de basse house garage façon Todd Edwards, d'amen breaks épileptiques, ou d'un esprit trance. On a même droit à un petit miracle dream house qui aurait eu complètement sa place dans sur belle compilation signée Young Marco, autre digger fou qui a eu droit à son Selectors l'année dernière.

En somme, le pari est difficile mais réussi. Joy O offre une sélection respectueuse du patrimoine anglais, et enchaîne les titres susceptibles d'être joués dans un club comme la Fabric aujourd'hui, ou hier dans un hangar désaffecté du fin fond du Dorset. En d'autres termes, tout (ou presque) est d'une efficacité que plus rien ne pourra altérer. Si Selectors 004 a ses légères baisses de régime (on pense aux titres de Beatrice Dillon ou Bitstream), tout a été choisi avec suffisamment d'exigence et de pertinence pour nous tenir en haleine d'ici à ce qu'on ait la chance d'entendre l'intéressé officier derrière les decks. Et avec ce genre de carte de visite, on ne raterait ça pour rien au monde.

Le goût des autres :