Volume II

Stygian Bough (Bell Witch & Aerial Ruin)

Profound Lore – 2025
par Simon, le 17 décembre 2025
8

Qui dit temps hivernal dit forcément, quelque part, Bell Witch. Maîtres incontestés de l'oraison funéraire en duo avec des œuvres absolument titanesques – oui, Mirror Reaper = chef d'œuvre – Dylan Desmond et Jesse Shreibman s'associe à nouveau avec Aerial Ruin pour emmener le deuxième volume de l'entité Stygian Bough. Un duo qu'on n'attendait pas forcément au départ mais qui s'est rapidement imposé comme une évidence tant le premier volume a su immédiatement introduire un langage commun bien supérieur à la somme de ses parts. Pourtant, si cette association marche à plein tube, rien n'est jamais gratuit avec Bell Witch. Et Stygian Bough ne fera pas exception.

Parce que ce Volume II n'a rien du disque immédiat. Il n'impressionne pas nécessairement à première vue : son déroulé coule sans accroc, avec une expression presque pop si elle n'en était pas à ce point funeral doom. Exit les allers-retours entre le growl souterrain des membres de Bell Witch et le chant clair de Erik Maggridge, ici il n'y en aura que pour Aerial Ruin. L'intégralité de ce volume deux est vocalement cristallin et, passée la déception causée par cet abandon du ping-pong vocal, on se rend vite compte que c'est un excellent choix. Premièrement parce que Maggridge est un fieffé conteur de fables tristounettes, mais aussi parce que Stygian Bough peut pleinement embrasser sa dimension quasiment folk, populaire au sens premier du terme. Une musique de coin du feu, lourde de sens, monstrueuse de narration.

On le répète, il n'y a absolument rien de catchy ici. Volume II est un disque d'histoires tristes, de suites contemplatives dont le dynamisme ne se révèle que dans la lenteur de son absorption, dans la répétition de l'écoute, dans cette notion de boucle infinie où Bell Witch fait l'ultime différence avec ses pairs. Stygian Bough n'est pas ici pour sortir un disque supplémentaire, il est là pour écrire le disque parfait de funeral doom triste jusqu'à en crever, qui élève la solitude et le deuil au rang d'arts. Une fois passée cette première barrière, ce disque en devient essentiel, marqué par la justesse totale de son propos et surtout de son exécution. En ça, Stygian Bough nous fait le même coup que Pallbearer l'année passée, à proposer un disque de grands maîtres doom, quitte à ne pas impressionner à première vue.

La Vérité est ailleurs, ici dans le substrat, de la mise en forme au service du coeur et de la vaillance. Vaillance dans les mots, dans les mouvements musicaux et dans cette capacité à aller jusqu'au fond de son tourment. Simplement, mais avec toute la puissance que cela nécessite. Seulement à partir de ce moment-là, chaque guitare électrique – là où Bell Witch ne travaille en solo qu'avec sa guitare basse – chaque clavier funéraire, chaque lever de batterie devient limpide dans ces quatre grandes constructions musicales. Stygian Bough n'a rien simplifié, il est juste en quête de l'essentiel, de la chanson triste parfaite. En rabotant, en faisant l'effort d'essentialisme, en séquençant sa pensée et son langage musical jusqu'à atteindre le fond de la grotte. Là où tout est juste, où tout devient fort par essence, là ou ne brille que le Vrai de la souffrance mise en mouvement. Une place pour chaque chose et chaque chose à sa place.