The Hives Forever Forever The Hives
The Hives
Tante Jeanine dont la spécialité est la tarte au sucre ne contredirait certainement pas l’adage selon lequel une bonne recette, c’est important. Entre dosage des ingrédients, gestes répétés depuis des lustres et temps de cuisson, il est des traditions avec lesquelles on ne plaisante pas. Parce qu’en effet, que diraient les enfants si leur premier coup de foudre gustatif ne se reproduisait pas par la suite. Si le visuel varie de temps à autres et qu’une marge d’erreur au niveau du topping est toujours tolérée, la texture et le goût doivent quant à eux demeurer et suivre une espèce d’autoroute des saveurs histoire de savoir où on va, de ne pas être désagréablement surpris et de saliver rien qu’à l’idée d’aller dire bonjour à Tante Jeanine. Oui, une bonne recette est importante.
Pour le rock’n’roll et ses dérivés, c’est très souvent la même chose et ce depuis des décennies. Bien sûr certains groupes tentent de sortir des chemins balisés et répondent aux sirènes de l’exigence de l’originalité au risque de décevoir (au hasard Royal Blood et son Typhoons en 2021). Mais pendant ce temps, d’autres, comme The Hives ont très bien compris qu’ils ne pourront et ne voudront pas sonner autrement que comme du The Hives. Dans ce cas, on creuse, on perfectionne et on charbonne toujours avec la même envie histoire non pas de surprendre mais de faire plaisir.
The Hives Forever Forever The Hives en est une digne illustration en proposant aux fans de la première heure comme à ceux qui les ont découverts sur le tard de rester dans une zone confortable mais en ne s’empêchant pas certaines fulgurances de compositions comme ce changement de tempo sorti de nulle part sur le refrain de « Paint a Picture ». Parce que suivre une recette ne signifie pas non plus faire en permanence du sur-place. Il n’est pas interdit d’évoluer tout en respectant les fondamentaux. La base des Suédois, et ce depuis leur premier album Barely Legal (1997), se compose d’un rock sautillant, de partitions punk et d’une production « garage » où le côté poussiéreux se palperait presque. The Hives a donné dès ses débuts une très bonne définition de ce qui est plus communément appelé le high energy rock’n’roll et dont ses compatriotes de The Hellacopters s’étaient faits prophètes en leur pays dès 1996 avec Supershitty To The Max mais en restant dans l'underground.
Efficace en diable, ce nouveau disque balaie les concept albums d’un revers de la main et opte pour la simple collection de potentiels singles aux refrains entêtants (« Hooray Hooray Hooray »), à l’énergie brute (« O.C.D.O.D. ») et aux mélodies popisantes (« Legalize Living »). Enregistré dans une configuration live au mythique RMV Studio de Benny « ABBA » Andersson et à nouveau produit par Pelle Gunnerfeldt (Viagra Boys, The Knife, Yung Lean), accompagné çà et là par des Mike D (Beastie Boys) ou Josh Homme (Queens Of The Stone Age) pour du consulting, THFFTH sonne authentique, organique et imparfait comme il le faut pour en faire un album fondamentalement humain et sans artifice. S’il n’est point besoin de crier au génie ici, on peut au moins saluer la démarche honnête et fidèle des punks dandy de The Hives qui font à nouveau preuve d’une maîtrise indéniable de leur recette, un peu comme Tante Jeanine au final.