Eskimo Snow

Why?

Anticon – 2009
par Gwen, le 20 décembre 2009
6

Lorsque cLOUDDEAD s’atomisa en 2004, il fallut bien admettre que l’univers du hip hop venait de perdre l’une de ses formations les plus atypiques et inventives. L’univers de l’électronica également. Et un peu celui du rock. Du trip-hop, de l’ambient, du psychédélique et combien d’autres encore. Ne s’imposant aucune limite dans leurs expérimentations sonores, Doseone, Why? et Odd Nosdam réconciliaient des genres qui avaient trop peu l’habitude de se fréquenter en bas de l’immeuble. 

Après la séparation, chacun s’en alla vagabonder dans son terrain vague musical, récoltant des succès variables. Mais au petit jeu de l’échappée belle, force est de constater que Why? s’est tout de même taillé la part du lion…

Derrière le point d’interrogation se dissimule le prolifique et insaisissable Jonathan “Yoni” Wolf. Sans doute lassé de s’agiter en solitaire pendant un temps, Wolf se mit en tête de rassembler quelques fidèles afin de cimenter son projet. Il recrute donc son frangin Josiah et Doug McDiarmid en guise de fondations, Andrew Broder et Mark Erickson pour occuper la scène. 

Il y a un peu plus d’un an, le trio nous avait gratifiés d’un excellent Alopecia qui s’aventurait sur une nuée de pistes sans jamais s’égarer. Le maître de cérémonie y déposait encore épisodiquement son phrasé unique sur un enchevêtrement de cordes, clochettes et claviers, évitant la facilité mais aussi l’hermétisme. 

Dans une certaine mesure, l’album Eskimo Snow, issu des sessions d’enregistrement de son brillant prédécesseur, se révèle décevant. Celui-ci ne recèle pas les trésors escomptés. Malgré les tintements et les arpèges de guitare, l’ensemble des compositions manque de vertige, de folie douce, de punaises sur la chaise de bureau. 

Après une période de transition, Yoni Wolf achève également sa mue vocale. Il délaisse définitivement son flow de palmipède désabusé pour un chant monocorde qui possède un certain charme mais néglige tout ce qui faisait sa singularité. De ce fait, ses textes à la sibylline poésie ne répandent plus la même saveur dans l’oreille. Installés dans leur compartiment couplet-refrain, les mots peinent à exister pleinement. 

Eskimo Snow n’en est pas pour autant un échec intégral. Il y a là un indéniable talent pour confectionner de délicates mélodies pop. De petites choses lumineuses et émouvantes telles que “Berkeley By Hearseback” ou “This Blackest Purse”. Se dessinant nettement sur la plaine, on distingue aussi l’inspiré “Into The Shadows Of My Embrace” qui se déploie tout au long de ses 4 minutes 30.

Dans une insatiable volonté de partager ses créations, Why? a sans doute péché par gourmandise. Les “chutes” ne se nomment pas ainsi par hasard et il est parfois requis de les laisser sur l’établi le temps de ciseler leur relief… Cela n’empêchera pas de guetter la prochaine sortie du groupe afin de découvrir ce que contient encore leur sac à malices.

Le goût des autres :
8 Julien 7 Julien L