Bad Cowboy

Seth Gueko

Because – 2013
par Simon, le 26 juin 2013
6

Même ceux qui chient sur le rap contemporain, sa conformité, sa violence et ses excès ont dû tomber de leur chaise en entendant pour la première fois débouler Seth Gueko dans les enceintes. Que vous l’ayez découvert avec La Chevalière, ses premières apparitions avec Booba (et le tonitruant « Démarrer ») ou le récent Michto, le père Gueko est devenu une référence, un vrai poids lourd qu’on contourne difficilement au moment de s’intéresser au rap d’obédience hardcore. Pour le dire tout de suite, nous, on l’aime. Mais genre, véritablement. On l’aime comme on aime un vrai bon pote, avec toutes ses qualités (supérieures) et ses (affreux) défauts. On l’aime pour tout ça, sur toute la ligne. Premièrement parce que ce gars est juste une machine à débiter de la punchline qui déboîte et une ode à la vulgarité la plus pure, la plus grisante. Deuxièmement parce que ce gars, c’est avant tout une histoire d’univers, de trip total. C’est peut-être pour ça qu’il est difficile de faire la gueule quand on écoute tout ce qu’a sorti Shrek Gueko, parce qu’avec un peu de second degré, ce mec a tout du gendre (pas du tout) idéal, irrévérencieux jusqu’au cœur de son corps caverneux.

Bad Cowboy n’est pourtant pas exempt de défauts, parfois gros comme une maison. Entre les titres massues (suffit de se pencher sur « Dodo La Saumure », « La Chatte à Mireille », « Farang Seth », « Lève Les Draps » ou « Golden Shower ») et les punchlines assassines qu’on trouve un peu partout sur le disque, certaines choses ne devraient jamais arriver : inviter Soprano en featuring pour niquer un des meilleurs titres du disque, taper dans des prod’ électro prout-prout  – rarissimes, heureusement – et plus généralement tomber dans des thèmes parfois niqués d’avance (globalement quand ça parle de meufs et de bite sur l’ensemble du titre) ou des productions plus faibles.

Pourtant ce mec, on se répète, on l’aime. Parce que toute cette grivoiserie révèle surtout un artiste qui ne sait rien faire d’autre qu’être fidèle à lui-même, à l’univers « camp de manouche/bite qui perle » qu’il a travaillé avec cohérence depuis ses débuts. On se sent très vite partout chez nous dans l’œuvre de Victor Yougo, taillée pour toutes les gueules cassées, les australopithèques, les amateurs de rap qui claque et les bourgeois gentilhomme que nous sommes. Cette attitude bidochon de la street, elle est sincère de la première à la dernière note sur ce disque, si bien que finalement Seth Gueko est au-dessus de la critique. Tout le temps. Taper sur notre Zinédine Tzigane, c’est comme se moquer de Patrick Sébastien, c’est injouable - de toute manière tu ne peux pas te moquer de Patrick Sébastien, il a inventé la fête. Tout cet humour gaulois magnifiquement assumé, cette vigueur dans le hardcore, cette manière d’intégrer tout le monde à la fête. C’est juste intouchable, et c’est pour ça qu’on passera toujours au-dessus des quelques ratés que comporte un disque du Lord Seth. Le Bigard du bitume a encore frappé. ZBLEX !