Bob Dylan joue pour les besoins de la sociologie (et pour un chanceux)

par Amaury L, le 16 décembre 2014

Ce concert du Zim d'à peu près 15 minutes a été organisé dans le cadre d'une expérience sociologique mise sur pied par une chaîne de télévision suédoise. Intitulée Experiment Ensam (Une expérience en solitaire), celle-ci  propose d'observer les réactions d'un être humain qui traverse une expérience de vie ordinairement réservée à des audiences massives. On imagine que le but, hautement fédérateur, est de montrer que nous avons besoin des autres pour ressentir des émotions et les partager.

Sauf qu'en visionnant cette vidéo, vous vous apercevrez assez vite que ce n'est pas nécessairement le cas lors d'une expérience musicale. En effet, la personne sélectionnée est un trentenaire suédois passionné de Dylan (celui-ci aurait vu 20 fois l'artiste en concert), et il est assez impressionnant de le voir fredonner presque toutes les paroles pendant la courte prestation. Le mec est manifestement en plein kif et, si on était pas aussi jaloux, on le prendrait dans nos bras lorsqu'il semble aux bords des larmes au retentissement de la première note d'harmonica.

Mais le malaise s'installe assez vite à la fin de la première chanson, puisque le chanceux dylanophile est le seul à applaudir - fatalement- dans cet  impressionnant théâtre. Au plaisir coupable de profiter à fond d'une expérience rare et hautement spirituelle (tous les grands fans de Dylan auraient vraisemblablement buté père et mère pour être à sa place) répond cependant un certain besoin de discuter, de communier avec des proches ou tout simplement avec des personnes qui partagent la même passion. Mais le sympathique Suédois n'en reste pas moins chamboulé près de trois semaines après cette épiphanie, car la musique de Dylan ne s'apprécie que via une certaine intériorité qui, par définition, n'est possible qu'en étant isolé de tout contact humain.

L'expérience aurait donc certainement été plus concluante si on avait planté un fan de Pantera seul devant un set de son groupe phare, obligé de mosher avec soi-même et de courir en rond sans but comme un bon vieux serpent qui se mort la queue. Ce sera pour une prochaine fois, assurément.