Dossier

Goûte Mes Mix #82 : Monolithe Noir

par Jeff, le 17 mars 2020

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Tracklist

  1. Woo - Swingtime
  2. Ellen Fullman - Dripping Music
  3. Joe Meek - The Bublight
  4. Anna Homler and Steve Moshier - Ee
  5. Einstürzende Neubauten - Susej
  6. Delia Derbyshire - Colour
  7. Faust - Knochentanz
  8. Pauline Oliveros - The Fool's Circle
  9. Terry Riley - Performance Two, Part 2
  10. Daniel Schmidt - Ghosts
  11. Jenny Hval - Female Vampire
  12. Kaitlyn Aurelia Smith - Stratus
  13. Colin Stetson - The Stars In His Head (Dark Lights Remix)
  14. Logos Duo - The Wall
  15. Nadah El Shaszly - Afqid Adh-dhakira (I Lose Memory)
  16. Beak> - When We Fall

Pour les Bruxellois de l'équipe, nos premières rencontres avec Monolithe Noir remontent à une époque où il était de très bon conseil derrière le comptoir de l'antenne belge du magasin parisien Balades Sonores. Et déjà, Antoine Pasqualini montrait à travers une sélection distillée à travers les enceintes du shop un amour pour toutes les musiques. Du coup, même si on le connaissait pour ses liens avec les musiques à guitare, on ne s'est jamais vraiment étonné de le croiser avec ses synthétiseurs et son rack modulaire en première partie de Raime dans l'AB Club un soir de 2017. Pour nous, un concert en forme de point de départ pour un projet que l'on a aimé voir grandir, s'affranchir de certaines influences évidentes (Four Tet, Jon Hopkins) pour aller vers quelque chose de plus profond, de plus varié, de plus personnel aussi. À l'occasion de la sortie de l'album Moira, on a posé quelques questions à Monolithe Noir, qui en a également profité pour nous offrir un mix exclusif. (crédit photo : Victor Pattyn)

Monolithe Noir est un projet que l’on suit depuis longtemps. Mais pour ceux qui te découvrent, peux-tu brièvement nous retracer ton parcours.

Je suis Breton et j’ai vécu ici et là en France : à Brest, Paris, Bordeaux. Je suis batteur de formation et j’ai appris la guitare puis d’autres instruments en autodidacte par la suite, pour reposer les oreilles de mes parents et surtout commencer à composer; ce qui m’a toujours trotté dans la tête puisque j’ai commencé très tôt à utiliser pour m’enregistrer le vieux magnétophone que ma grand-mère utilisait en cours d’anglais. J’ai donc su assez tôt que je voulais fabriquer et fixer de la musique sur un support physique, quel qu’il soit.

Tu as ‘transitionné’ du rock vers les musiques électroniques. Concrètement, comment s’est déroulée cette mue ?

Quand j’y pense aujourd’hui, la musique électronique ou du moins l’interrogation de ce qui il y avait au-delà de ce à quoi j’avais accès en termes de musique, a parcouru toute ma vie. Je me rappelle que mon père utilisait un compresseur dans son atelier, je me rappelle avoir été hypnotisé par ce bourdon et découvrir la richesse harmonique et sonore d’outils pourtant pas destinés en premier lieu à faire de la musique. Durant tout mon parcours j’ai utilisé des outils qui m’ont petit à petit rapproché des musiques électroniques, jusqu’à ce que je découvre concrètement des artistes qui viennent me conforter dans ce goût pour des sons moins conventionnels et notamment plus électroniques. Je me rappelle aussi d’avoir entendu Andy Stott en concert et me dire que je voulais pouvoir procurer ce genre de sensations à ceux qui écouteraient ma musique, même si dans les faits je ne me suis pas exactement lancé sur cette voie.

Si l’on cite comme référents des artistes comme Jon Hopkins, Floating Points ou Four Tet, trouves-tu cela flatteur, ou au contraire réducteur, voire à côté de la plaque ?

C’est à la fois flatteur, parce que j’apprécie leur travail que je trouve de grande qualité, et réducteur parce que j’ai le sentiment que ma musique va à la fois puiser dans des formats électroniques mais aussi dans le format chanson. L’écriture me semble différente en tout cas, moins linéaire et plus accidentée.

Bien que tu sois basé à Bruxelles, c’est sur un label français, Kowtow Records, que tu as trouvé refuge pour sortir Moira. Ce choix est dicté par une volonté de ne pas se limiter à un marché aussi petit que la Belgique ou par l’absence d’un label belge qui ait réussi à bien comprendre ton projet ?

Je n’ai pas pensé en termes de marché pour être honnête et je pense par ailleurs que plein de labels belges sont capables de rayonner en dehors de leurs frontières ! Je pense à Vlek ou Black Basset Records, entre autres. Après effectivement je n’ai pas rencontré ou trouvé de label avec qui je me sente artistiquement en phase. J’ai rencontré Vincent Leibovitz quand il montait le label Kowtow Records, on s’est très vite entendu musicalement et humainement et j’ai apprécié la démarche esthétique encore naissante du label. Et Vincent a su créer une famille autour du label avec Penelope Antena, Malvina Mesnier, Sébastien Forester, Airsouth, Synthomas et tout un tas d’artistes qui participent à la vie du label.

Tu as commencé Monolithe Noir comme un projet solo, en studio comme en live. Aujourd’hui, on y entend de plus en plus de voix « extérieures », et en live tu te fais accompagner d’un batteur. Comment expliques-tu cela ?

Par la nécessité d’ouvrir les fenêtres et d’aérer le projet. Même si ce projet reste une aventure très solitaire au moment de la conception des titres ç’a été très excitant de confier les bouts de morceaux que j’avais à elsie dx, Peter Broderick et Rozi Plain. Les trois m’ont vraiment surpris tellement ils ont amené les morceaux à des endroits surprenants pour moi. Je suis sûr que les trois étant compositeurs, ils.elles ont dû faire beaucoup efforts pour lâcher prise et accepter que je finalise ces morceaux. Pour cet qui est du live, j’ai mis pas mal de temps pour des raisons pratiques mais aussi artistiques à ouvrir la formule et accueillir un batteur. Je savais que j’en avais envie mais l’exercice était et reste périlleux, il faut créer une vraie rencontre entre des sonorités électroniques et des sensibilités différentes, faire en sorte que tout soit jouable et réinventer certaines parties. L’avantage est qu’on se retrouve constamment face à une machine mouvante et à chaque fois surprenante.

Peux-tu nous parler du mix ?

J’ai toujours un assez fort penchant pour les musiques assez sombres comme on peut l’entendre. Ça ne m’évoque pas des idées noires ou des états dépressifs, ce sont simplement des ambiances dans lesquelles je me sens à mon aise et avec lesquelles je peux facilement faire des ponts avec ma musique. On y trouve quelques morceaux composés après le bug de l'an 2000, mais pas trop.

monolithenoir.bandcamp.com