Dossier

Goûte Mes Mix #67: Casual Gabberz

par Jeff, le 25 juin 2017

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Tracklist

  1. Krampfblaster - Above & Above
  2. The Diplomats - Salute
  3. Miro - Shining
  4. Boe Strummer - Chanter pour ceux
  5. Dj Rob - Boys Interface
  6. Mala feat. Booba - Danse pour moi
  7. Holy Noise - The Nightmare (Power Mix)
  8. Crypsis & Radical Redemption - Drug 'N Roll
  9. Evil Bikrav - RAGE
  10. Rotterdam Termination Source - Return Of Da Source
  11. BrainCrash - the Shadow
  12. Slavefriese - Five Minutes After The Pill (FE Remix)
  13. D`Spyre - Crystal Repudiation
  14. Marshall Masters Feat. The Ultimate MC - Master Anthem (Rave Anthem remix)
  15. Evil Grimace - 3 Litres

Comme à peu près tous les genres musicaux s’amusant avec les extrêmes, le gabber est extrêmement codifié. Né dans les années 90 à Rotterdam, ce sous-genre de la techno hardcore, bâtard et brutal, s’est rapidement transformé en véritable mouvement culturel : de la coupe de cheveu « bien dégagée sur les côtés » aux survêtements amples en passant par le ‘hakken’, les éléments typiques de cette scène sont vite devenus son ciment. Et si le gabber a connu son âge d’or à la fin des années 90 / au début des années 2000, il était tombé depuis dans les oubliettes de la hype.

Pourtant, depuis une paire d’années, les Casual Gabberz parisiens tentent de remettre le gabber au goût du jour. Pas d’opportunisme puant ou de grosses ficelles marketing visant à occuper un terrain qui ne le serait pas encore, mais juste une envie de se faire plaisir, comme nous l’explique un membre du crew, Claude Murder: « Quand on a commencé il y a 4 ans, on voulait juste jouer cette musique même si on ne la connaissait que très peu. On voulait ramener quelque chose de radical dans le paysage club parisien de l’époque. On avait tous plus ou moins déjà un pied dans l’organisation de soirées et on voulait explorer un truc nouveau. Notre attrait pour ce son venait de différentes choses; on avait des souvenirs de jeunesse des pubs Thunderdome à la tv, certains d’entre nous venaient du rap, d’autres de la techno, de l’EBM voir même de la pop expérimentale, mais on voyait tous en filigrane l’héritage de la musique européenne dure au sens large. Dès le début on sentait qu’il y avait quelque chose à creuser, que prendre cette musique comme point de départ nous amènerait vers quelque chose excitant. »

Pourtant, malgré la noblesse de la démarche, ceux qui ont écouté un peu de gabber dans leur vie le savent : difficile de débarquer dans les clubs avec une musique aussi extrême, qui fait l’effet d’un ponçage de burnes au papier verré sur les oreilles mal préparées. Mais là aussi, c’est mal comprendre l'approche du crew, et carburer aux clichés avant même d’avoir commencé l’écoute : « Je crois que les gens se focalisent plus sur le “Gabberz” dans notre nom alors qu’on est autant “Casual”. La musique qu’on prône n’est pas le Gabber. Alors oui, on en joue énormément et oui, on s’en inspire, mais si tu écoutes la compilation Inutile de fuir tu comprends qu’on essaye pas de faire du gabber stricto sensu, c’est plus un point de départ. On s’en nourrit comme la club music contemporaine ou la trap nous inspirent. » En même temps, les seules présences de Krampf, Orgasmic ou Butter Bullets sur la fameuse compilation citée plus haut sont du genre à rassurer les âmes les plus sensibles qui auraient trop peur de demander leur naturalisation néerlandaise au terme d’écoutes trop répétées.

Justement, tant qu’on parle des Pays-Bas, il est intéressant de voir que cette nouvelle scène parisienne qui casse les codes n’a pas peur de se confronter au true OG’s rotterdamois, dont on pourrait pourtant penser qu’ils agissent en gardiens du temple ultra-protecteurs : « Via le mini-festival GABBER EXPO que nous avons organisé en 2014 et via les bookings qu’on a pu faire depuis 4 ans comme Dj Rob ou RTC, on a pu lier des liens forts avec quelques papas de la scène. Ils hallucinent tous du public, la danse, les looks, l’énergie... C’est vraiment différent de ce à quoi ils sont habitués - on a toujours de supers retours. Lors du tournage du film INUTILE DE FUIR de Kevin Elamrani-Lince, c’est Georges Ruseler de Rotterdam Terror Corps qui nous a indiqué le chemin à suivre pour accéder à la zone industrielle du port de Rotterdam. C’est là qu’il a organisé ses premières teufs, c’était assez émouvant de tourner là-bas après l’avoir écouté nous en parler. Je pense qu’ils sont heureux de voir que l’esprit de leur musique fait des petits. Il n’y a pas de compétition, on essaie d’être le plus sincère et respectueux et pour l’instant tout va bien. »

Vous l’aurez compris, un peu à leur surprise, les Casual Gabberz vivent un rêve éveillé, eux qui arrivent à toucher de plus en plus de monde avec une musique qui a toujours eu mauvaise presse auprès de ceux qui ont enfin remisé leurs préjugés au placard. Et cet été, la fine équipe aura notamment l’occasion de montrer ce qu’elle a dans le bide au Dour Festival: « C’est une configuration un peu inédite pour nous car on sera cinq sur scène (Aprile, Evil Grimace, Paul Seul, Von Bikräv et moi-même) pour un DJ set d’une heure alors qu’on a plus l’habitude d’avoir de long sets individuels. On a prévu un méga-concentré de nos cinq personnalités et de ce qu’on compte continuer à défendre dans nos soirées et via nos sorties sur le label Casual Gabberz Records. » C’est justement dans cette optique que les Casual Gabberz nous ont concocté ce Goûte Mes Mix qui vise autant à remettre les pendules à l'heure qu’à préparer une nouba qui s’annonce dantesque du côté de la plaine de la Machine à Feu. Ça se passera de 3 heures à 4 heures du mat', et la Petite Maison dans la Prairie risque de passer un sale quart d'heure.

casualgabberzrecords.bandcamp.com