Dossier

Boîte à trésors : Marc Jacobs (Bozar Electronic Arts Festival)

par Yann, le 19 septembre 2016

Ce weekend, une bonne partie de l'équipe va prendre ses quartiers au Bozar bruxellois pour une raison assez simple: le Bozar Electronic Arts Festival. Papillons dans le bidou, humidité dans les slips. Comme d'habitude, les programmateurs se sont fait plaisir et régalent avec une affiche qui allie jolies musiques électroniques, belles découvertes et tentatives d'amener les oreilles curieuses vers des choses plutôt perchées et obliques. On croisera ainsi au Bozar ce week-end des gens comme James Holden, Gold Panda, Jlin, Surgeon, Vessels ou Tim Hecker, pour ne citer que les noms les plus 'visibles'. Visible, ce sera également le cas de l'installation créée par les gars de Raster-Noton. Bref, du très beau monde, et de très belles choses. Mais croyez-nous sur parole, c'est aussi (et peut-être surtout) en début et en fin de soirée que l'on fait les plus belles découvertes au BEAF. Histoire de ne pas s'y perdre dans cette impeccable programmation, on a demandé à l'un des deux hommes qui l'ont élaborée, Marc Jacobs, de nous prendre un peu par la main le temps de dix titres qui font office de bel échauffement.

Alessandro Cortini

La Sveglia (Risveglio – Hospital Productions – 2015)

Un des maîtres actuels des synthés analogiques. Son dernier album est une perle dans le genre, composé uniquement à l’aide d’un Roland MC-202—un synthé/sequencer monophonique. Même s’il a traîné avec Nine Inch Nails pendant un petit temps, c’est surtout avec son travail en solo que le gars trouve une vraie place dans BEAF. Sa musique est minimale, répétitive avec des mélodies plutôt mélancoliques qui devraient plaire aux fans de Boards of Canada, voire créer des liens avec certaines musiques de films de John Carpenter.

Tim Hecker

Black Phase (Love Streams – 4AD – 2015)

C’est la deuxième fois qu’on l’accueille au BEAF et, cette fois-ci, il jouera dans la salle Henry Le Bœuf avec un lightshow adapté pour une immersion totale dans le son et la brume. Son dernier album est plus difficile d’accès que son travail précédent je trouve, mais dans le genre « ambient » (terme qui veut tout et rien dire en fait), ou plutôt musique sans beats ou percussions, le travail de Hecker en général est essentiel. Ici, il a surtout travaillé l’orgue et les voix, en y rajoutant des couches sonores savamment tissées et des lignes répétitives de basses analogiques. Il crée le lien parfait entre les musiques contemporaines, l’électronique abstraite et les scènes plutôt axées noise. Tout en douceur intense.

Roly Porter

4101 (Third Law – Tri Angle records – 2016)

Son dernier album a été une des claques musicales de l’année. Il a débuté sa carrière avec le duo Vex’d, plutôt dubstep, ce qui s’entend en définitive dans sa maîtrise de la production et sa gestion des quelques beats épars. Mais ici, on est très loin de la dubstep, on est plutôt dans quelque chose d’assez unique, une musique imaginaire pour un film de science-fiction dystopique. Cordes déchirantes, sub-basses qui défoncent, bruits blancs abrasifs, field-recordings, des bribes de mélodies qui apparaissent et qui disparaissent. Pour le BEAF, il sera accompagné, comme Tim Hecker, de MFO (aka Marcel Weber) pour présenter son nouveau show audio-visuel. On tentera de monter le volume au maximum et le concert se vivra assis.

James Holden

Live pour Crack Magazine

L’album Elaenia de FP sorti en 2015 était génial. C’est une fusion de musique électronique avec une esthétique jazz qui bouleverse le genre et qui fonctionne très bien selon moi. Je suis également un grand fan de son EP Shadows qui est uniformément bon. J’ai choisi "Sais", en partie pour avoir un verbe français dans cette liste mais aussi pour démontrer son habilité qui semble innée à intégrer un élément de soul dans la musique électronique. J’adore le côté décalé et l’utilisation intelligente des cordes, du synthé et de l’orgue. 

Jlin

Asylum (Bang & Works vol. 2 – Planet Mu)

Assez nouvelle dans la scène plutôt footwork (musique dancefloor issue de Chicago, qui allie des relents de trap, de techno, de hip-hop, etc.), elle a réussi à s’imposer grâce, entre autres, à un très bon album sorti l’année dernière sur Planet Mu (dont on a fêté les 15 ans d’existence l’année dernière au BEAF). Les soirées du festival se terminant sur le dancefloor, on tente de présenter des artistes qu’on ne voit pas souvent à Bruxelles. C’était évident pour nous que Jlin en fasse partie, c’était une des premières confirmations du festival. Ici, un très cool track qui ne figure pas sur son album.

Not Waving

Get serious 12’’ (diagonal 2015)

Alessio Natalizia est actif depuis un certain temps, déjà avec son duo Walls (Kompakt) mais aussi avec Banjo or Freak Out (plutôt pop électronique). Récemment, il a sorti des 12'' et un album sur Diagonal - le label de Powell – avec lesquels il explore plutôt des sonorités post-punk, EBM et discopunk taillées pour la piste, mais pas que. C’est sale, assez jouissif et ça devrait créer un chouette contraste avec le côté clean et sérieux de Bozar.

Damien Dubrovnik

Live at Home Sweet Home – New York - 2015

On compte encore bien explorer cette nouvelle scène d’électronique dangereuse venue du Nord. La veille, on propose Body Sculptures, une espèce de super-groupe avec des personnalités issues de différents pays scandinaves, dont Loke Rahbek (fondateur du label Posh Isolation et une moitié de Damien Dubrovnik). Même si leur approche pourrait être associée à toute une mouvance noise, post industrielle, performance-art, etc., leur attitude est assez excitante et surtout imprévisible, chose qui manque parfois cruellement dans le chef de ces scènes–là.

Noveller

Live Angers - 2015

Sarah Lipstate est cinéaste et guitariste. Elle est seule, avec une série de pédales d’effets et construit des pièces instrumentales quasi lyriques, c’est vraiment très beau. En invitant des artistes comme Noveller, ou Stephen O’Malley l’année dernière, on veut créer des liens entre certaines musiques qui, au final, se répondent ou qui ont des racines communes, comme par exemple le mouvement des minimalistes américains (Steve Reich, Terry Riley, La Monte Young etc). Ça nous semble évident mais tout est tellement cloisonné !

Dirk Serries

There’s a light in Vein (Tonefloat 2013)

Consouling Sounds est un label et un disquaire gantois qui s’installera à Bozar lors des 3 jours du festival avec un pop-up store. CS nous a aussi proposé 2 artistes, dont Dirk Serries. C’est un personnage assez incontournable et pourtant méconnu en Belgique francophone. Un des pionniers belges de l’« ambient » et du minimalisme sous son pseudo VidnaObmana, avec des incursions dans l’électronique et dans le post-metal avec Fear Falls Burning. Il a une discographie impressionnante et multiplie les collaborations, entre autres avec Aidan Baker (1/2 de Nadja), qui jouera aussi lors du festival. Pour BEAF, il se produira seul à la guitare et invitera les auditeurs à pénétrer dans son univers très personnel.

Raster-Noton

White Circle

Pour les 20 ans du label allemand, le BEAF accueille une installation monumentale dans le Hall Horta. Il s’agit d’une structure en métal, avec des lumières, sur 360°. Le public y assistera en permanence à une expérience audio-visuelle immersive, avec des nouvelles créations sonores de Carsten Nicolai (aka Alva Noto), Frank Brettschneider, Byetone et Kangding Ray. Un projet idéal et qui donne tout son sens au BEAF. La vidéo n’est là que pour teaser, en vrai, c’est dingue.