Concert

Get Well Soon

Reims, La Cartonnerie, le 26 avril 2009
par Popop, le 29 avril 2009

Il y a toutes sortes de concerts. Des calmes et des déjantés, des frustrants et des euphorisants, des communions passionnelles et des bides retentissants. Mais de tous les sentiments qui peuvent nous traverser avant, pendant ou après un concert, de tous les cas de figure imaginables, il y en a un qui me plaît tout particulièrement : le rassurant.

Rassurant, voilà le terme qui sied le mieux à la prestation des Allemands de Get Well Soon et des Sud-Africains de Dear Reader à la Cartonnerie de Reims. Rassurant d’abord car les deux groupes ont confirmé sur scène tout le bien que l’on pensait d’eux sur disque. Rassurant ensuite parce que derrière la musique se cachent des personnalités touchantes et attachantes, visiblement heureuses de pouvoir s’exprimer sur scène (on n’est jamais à l’abri du con talentueux mais prétentieux). Rassurant enfin parce que malgré peu de publicité et un timing moyen (dimanche soir, concert débutant à 18h, public rémois peu connu pour son accueil chaleureux), les deux formations ont su faire des merveilles en offrant à la centaine de personnes présentes ce soir trois pures heures de bonheur.

Si le public est encore très éparpillé quand débarquent vers 18h45 la pétillante Cherilyn MacNeil et ses compères, il ne faut pas plus d’un titre à Dear Reader – accompagné pour l’occasion de deux musiciens de Get Well Soon – pour subjuguer l’auditoire. Ce titre, "Never Goes", se révèle pourtant être un véritable numéro d’équilibriste sur scène – comme la plupart des extraits de Replace Why With Funny. Mais grâce à quelques petits subterfuges (notamment l’enregistrement en live de choeurs utilisés ensuite en boucle en arrière-plan), le groupe s’en sort à merveille et peut alors dérouler la majeure partie de son album avec classe et sobriété – et même une pointe d’humour.

On s’en doutait déjà, la voix de Cherilyn MacNeil confirme son statut de véritable star de la soirée, dévoilant à chaque instant toute sa puissance et toute son amplitude - douce sur "Release Me", sèche sur "Dear Heart", presque violente sur le final de "Great White Bear". Il n’en faut pas plus pour conquérir définitivement un public qui parvient à arracher un court rappel, sous la forme de l’inédit "Heavy" qui donne déjà envie d’en entendre plus de la part de ce groupe décidément surprenant.

Au moment d’enchaîner sur la prestation de Get Well Soon, une question se pose : comment Konstantin Gropper va-t-il réussir à retranscrire sur scène toute la richesse de sa musique ? La réponse est simple : en remplaçant ses manières d’homme-orchestre de studio par une approche en groupe plus directe et plus rock. Avec juste un violon et une trompette en guise de support, les compositions du jeune allemand se révèlent sous un autre jour, encore plus impressionnant. Les superbes ballades que sont "I Sold My Hands For Food So Please Feed Me" et "People Magazine Front Cover" reprennent leur respiration une fois débarrassées de leurs déluges de cordes et de cuivres, tandis que les singles "If This Hat Is Missing I Have Gone Hunting" et "Listen ! Those Lost At Sea Sing A Song On Christmas Day" (pfou, ces titres !) menacent à tout instant de crever le plafond de la Cartonnerie – trop bas pour une musique de cette envergure.

Et puis surtout, on découvre sur scène un personnage que l’on n’imaginait pas ainsi, timide, humble, à des kilomètres de la mégalomanie affichée sur disque, ânonnant quelques mots maladroits de remerciement en français. Alors que l’on pouvait s’attendre à trouver un cabotin dans le style d’un Rufus Wainwright ou d’un Neil Hannon, le contraste n’en est que plus saisissant. Après avoir égrené la majeure partie de son premier album, Rest Now Weary Head…, l’Allemand revient à deux reprises sur scène, gratifiant le public rémois d’une reprise de Tom Waits, d’un inédit et surtout du superbe "Dear Tempest-Tossed ! Dear Weakened !" (non mais ces titres quoi) du récent EP Songs Against The Glaciation.

Fin de soirée, double victoire par K.O, visages souriants aux quatre coins de la salle, disques qui se vendent comme des petits pains à la sortie, bouche-à-oreille qui ne fait que commencer… Bref, une soirée vraiment rassurante !