Concert

Frank Ocean

Le Zénith, le 3 juillet 2013
par Aurélien, le 9 juillet 2013

Que ce soit pour Beyoncé ou Frank Ocean, être une midinette le temps d’une heure et demie, c’est un luxe qui impose de casser sa tirelire. Et la première prestation parisienne de l’interprète de "Super Rich Kids" ne pouvait pas échapper à la règle : il a fallu en effet aligner une cinquantaine d’euros pour voir le bel éphèbe défendre sur scène sa discographie naissante. Un show pas forcément à la portée de toutes les bourses qui explique que le Zénith n’affichait pas complet ce mercredi 3 juillet. Heureusement, de l'intimité, de l'émotion et des frissons, il y en a eu à la pelle.

Par contre, on suppose que l’ingé-son du Zénith était dans un état d’alcoolémie plus critique encore que le nôtre, car impossible de justifier autrement les basses dégueulasses, les balances complètement violées, et le quintal de reverb apposé à la voix du crooner bisexuel. Des problèmes pour autant loin d’avoir gêné les troupeaux d'usines à cyprine disséminées dans toute la salle et qui resteront plusieurs chansons durant le bras en l’air pour filmer la prestation avec leur iPhone. Donc oui, il ne manquait plus qu'une ex un peu rancunière dans le coin pour que tous les ingrédients de la pire soirée de ta vie soient réunis.

Mais soudain, le miracle se produit: même dans d’aussi piètres conditions, la sauce prend. Et elle prend tellement bien que l'on peut alors même croiser dans la fosse du gros dur à snapback en train de travailler son falsetto sur des trucs comme "Thinking About You". Il faut dire que Franckie O. rayonne littéralement sur scène, livrant une prestation classieuse qui évite soigneusement d’en faire des tonnes. Fidèle à lui-même, le bonhomme semble mettre en effet un point d’honneur à ne pas donner dans le show à la Miguel ou à la Janelle Monae: il danse à peine, déchaîne rarement la foule et, comble de l’insolence, chante souvent une main dans la poche ou le cul sur une chaise. Mais son jeu de scène est parfaitement compensé par la formidable dimension live d’une setlist conjuguant les moments de bravoure de Channel Orange et de Nostalgia Ultra, interprétés sans la moindre fausse note par un band aux petits soins – et qui a occasionné quelques grosses standing ovation, comme sur le formidable "Bad Religion". Juste un petit bémol : on a parfois senti le maître de cérémonie plus dans la démonstration des capacités de son formidable organe vocal que dans l’émotion véritable. Mais on a à dire vrai bien trop pris notre pied pour lui en tenir rigueur.

Car Frank Ocean, avec trois bouts de ficelle, a fait rêver petits et grands ce soir et n’est pas loin d’avoir incarné l'Amérique dans toute sa splendeur hollywoodienne. La légende raconte d’ailleurs qu’il aurait convié quelques fans en backstage à savourer un plat de pâtes pas démérité. De notre côté, nous terminerons notre course au McDo. Et on a pas eu assez d’un repas pour faire le débriefing de cette jolie soirée aux bons moments aussi nombreux que les étoiles du drapeau de la patrie de tonton Barack.