Wake in Fright

Uniform

Sacred Bones  – 2017
par Michael, le 2 février 2017
7

Cela fait maintenant dix ans que Sacred Bones sort des disques et on ne perçoit toujours pas le moindre signe d’essoufflement pour un label qui gère un catalogue qui n’est certes pas celui de Matador ou de 4AD, mais est tout de même assez conséquent - Jenny Hval, Blanck Mass, Moon Duo ou Pharmakon font tous partie dudit le catalogue. La structure de Caleb Braaten édite toujours un nombre non négligeable de références (dans lesquelles il n’y a, en général, pas grand-chose à jeter) et a réussi à se forger une identité forte. Là où certains s’essaient au renouvellement avec un succès parfois pas totalement au rendez-vous (au hasard, Captured Tracks), Sacred Bones garde le cap d’une esthétique fidèle à ses débuts. Dans ce contexte, chaque nouveau groupe signé ne manque pas d’attiser notre curiosité, comme c’est le cas avec Uniform.

Alors certes, Michael Berdan (ex-Drunkdriver) et Ben Greenberg (ex-The Men, accessoirement producteur d’une bonne partie du catalogue de SB) ne sont pas des lapins de neuf jours puisqu’il s’agit ici de leur deuxième long format, mais force est de constater que sur Wake In Fright, le duo frappe très fort et assène sans ménagement un mélange très pertinent d’indus, de post-punk, de hardcore et de déflagrations sonores baignées dans une huile de friture bien grasse. Les influences semblent évidentes, du moins pour le côté indus : Ministry, Fœtus, Godflesh, Pig, Prong, avec un son plus brut et une production resserrée qui va droit à l’essentiel. Rien de neuf en somme, mais à l’écoute de Wake In Fright on ne peut que capituler devant la pertinence de ce son en 2017.

Peu d’effets de manche et pas de superflu pour un album qui n’est pas là pour vendre du rêve. Ici, on donne plutôt dans le curetage dentaire et l’épilation à froid. Un gros défouloir qui doit être porté à des volumes limite en mode scénique. Enfin, c'est ce que l'on se dit lorsque l’on écoute des titres tels que « The Tabloid » ou « The Killing of America ». Ce qui fait également plaisir, c’est que si l’on se situe dans un genre (ou du moins au croisement de genres) bien identifié, Greenberg et Berdan ont laissé de côté tout le décorum parfois inhérent à ceux-ci pour en produire une version normcore capable de capter à peu près tous les publics. On ne serait donc pas surpris de les croiser à l’affiche de festivals metal, dans des centres d’art ou dans des salles à la programmation plus grand public. Ce qui, pour un groupe ayant choisi de se nommer Uniform, est un paradoxe assez savoureux.