Veckatimest

Grizzly Bear

Warp Records – 2009
par Julien, le 17 juin 2009
9

Federer aura enfin gagné Roland-Garros, c'est ce que l'Histoire retiendra et on oubliera du coup les défaites prématurées de Nadal ou Djokovic. La victoire de Roger est belle, certes, mais elle l'aurait été encore plus dans une vraie adversité, dans un duel de titans. Veckatimest, le nouveau Grizzly Bear, arrive au contraire du Suisse face à un groupe au sommet de sa gloire : Animal Collective. Eux ce sont les numéros 1 mondiaux : toute la presse les adore, tout le monde les écoute. Bien qu'ils me semblent globalement très surestimés, Merriweather Post Pavillion, leur meilleur album à ce jour, les amène sans mal en final de Grand Chelem. Avec en outsider, donc, Veckatimest.

Depuis 2006 et l'excellent Yellow House, le buzz n'a cessé de monter autour du collectif warpien. Le side project Department of Eagles nous avait bien annoncé, l'an denier, que les attentes autour de Grizzly Bear étaient énormes. Leur nouvel album allait quoiqu'il arrive faire  parler de lui. Le bébé entre les mains, retourné des dizaines d'heures dans mes oreilles, j'affirme que Veckatimest bat Merriweather Post Pavillion à l'aise en 4 sets : 7-6 4-6 6-3 6-0. Une victoire sans trop de frayeurs grâce à une bien plus grande consistance dans le jeu. Grizzly Bear possède en effet ce qu'Animal Collective n'aura jamais : un vrai feeling de musicien et une grande humilité. Quand le groupe de Noah Lennox se perd en expérimentations aléatoires, poussives et vides de sens, celui de Daniel Rossen garde le cap de la musicalité à tout prix. Veckatimest est très riche, lui aussi, mais il ne perd jamais de vue son objectif premier : écrire de belles chansons. Elles s'ornent de  digressions jazzy ou bluesy, de morsures noise ou d'élans psychédéliques sans jamais quitter les chemins balisés du songwriting pop-folk. Ce qui pourrait passer pour une forme de paresse est en fait un sublime geste d'artiste : laissons la vraie folie à d'autres, aux vrais acteurs de la scène expérimentale : en tant que groupe arty nous n'allons  pas changer le monde. À l'opposé des ambitions folles d'Animal Collective, donc, Grizzly Bear oeuvre pour le génie artisanal, le savoir-faire millénaire.

Tous ses groupes freaks ne sont que des groupes de pop et Grizzly Bear l'assume de la plus belle des manières. On pense assez souvent au fameux album des Fleet Foxes pour le côté pastoral et l'omniprésence de choeurs angéliques. En allant encore plus loin dans les idées de production et la magnificence des mélodies, lorgnant ainsi du côté de Robert Wyatt. Veckatimest, en fait, coule aux oreilles comme un disque des Beach Boys. Et ce n'est pas un maigre compliment dans ces temps d'errance post-hippie. Tranquillement et facilement un des disques de l'année.

Le goût des autres :
8 Nicolas 8 Popop 6 Splinter 9 Adrien 9 Julien Gas 7 Amaury L