Unframe

Wols

Pingipung – 2011
par Jeff, le 31 mars 2011
8

Je ne sais pas vous, mais moi, quand on me parle de musique en Russie, je pense à deux pseudo-lesbiennes dont le "All the Things She Said" nous a bien pourri la vie en 2002, à Boris Eltsine rond comme une queue de pelle qui nous montre ses plus beaux pas de danse ou à ce boute-en-train de Vladimir Poutine massacrant le "Blueberry Hill" de Fats Domino devant un parterre de people faisant semblant de trouver ça complètement bath. Par contre, quand on me parle de Russie et de musique, j'ai du mal à m'imaginer un duo de jeunes types originaires d'une ville pourrie à quelques encablures de la Mer Noire dont le premier album est l'un des trucs les plus frais et inattendus de ce début d'année 2011. Pourtant, Wols n'est pas une farce ou un projet monté de toutes pièces par des cracks de l'industrie désireux de travailler dans le plus grand secret. Non, Wols est l'association d'Evgeny Shchukin et Alexander Tochilkin, deux types dont les méfaits comptent à l'heure actuelle 45 pauvres fans sur Facebook – un véritable scandale à l'écoute de ce Unframe de très haut niveau.

Visiblement passionnés par le meilleur du abstract hip hop, du broken beat ninjatunesque, de l'electronica finaude et des dernières mutations en date de la bass music britannique, nos deux Russes se sont fixés pour objectif de façonner une musique aux points d'entrée multiples et suffisamment intelligente pour laisser coexister en permanence ses versants cérébral et festif. Partant de cet alléchant postulat de base, le programme concocté par le duo Shchukin/Tochilkin ne peut être qu'intéressant: bien calé entre basses lourdes, variations rythmiques foisonnantes et claviers qui ne s'imposent aucune limite sans pour autant tomber du côté ridicule de la force, Unframe se révèle rapidement être un disque d'une fraîcheur à toute épreuve qui fait plus que tenir la distance – et quand on sait que celui-ci affiche presque 60 minutes au compteur, on prend un peu plus conscience du petit tour de force réalisé par nos deux inconnus. Véritable hommage aux galettes les plus usées de la discographie du duo, ce premier effort est d'une maturité inattendue vu le jeune âge de ses protagonistes. Mais surtout, Unframe évite le piège de l'hommage poli et policé à outrance pour se convertir en une carte de visite idéale pour un binôme qui mérite clairement plus qu'une quarantaine de fans sur le plus grand réseau social du monde.