Tromatic Reflexxions

Von Südenfed

Domino – 2007
par Simon, le 20 juillet 2007
7

S’il surgit de temps à autre des collaborations surprenantes, celle-ci fera date par son caractère incongru aux premiers abords : les dérangés de Mouse on Mars, connus pour leurs expérimentations électroniques pour le moins décalées, rencontrent dans le plus grand fracas le leader déjanté de The Fall, Mark E. Smith, pour un résultat qui s’annonçait dès le début explosif à l’écoute de « Wipe That Sound », qui marquait l’origine de cette union en 2005 . Et dès les premières secondes d’un « Fledermaus Can’t Get It » explicite, la personnalité de cette association hybride se dévoile sans autre formalité : agressive et tranchante, la voix de Mark vous saisit à la gorge pour ne plus vous lâcher tandis que le duo allemand massacre ses platines avec des arrangements directs et assassins. La voix est insolente et hautaine, collant à la perfection aux productions en jouant sur un effet de contraste évident mais efficace quand il s’agit de taper précisément là où ça fait mal, allant jusqu’à nous évoquer, non sans un certain plaisir, James Murphy de LCD Soundsystem. L’album enfile les tueries à la suite, comme ce« Serious Brainskin » qui opte pour un breakbeat sauvage dont la puissance destructrice de ses nappes acides se voit multipliée par la présence charismatique de ce vilain garçon qui ne chante plus mais crache, vomit des lyrics salis par la nonchalance des grands soirs.

Et le disque roulera sa bosse dans ce créneau house/post-punk, nous projetant sans vergogne de part et d’autre de la pièce, jusqu’à l’apparition d’un « Chicken Yiamas » plus sobre dans l’apparence, créant dans des arrangements presque « post-country » (avec des « post » je mettrais GMD en bouteille) un espace de repos bien mérité, une accalmie dont le disque souffre cruellement dans sa première moitié, rendant parfois les pistes indigestes malgré des productions infaillibles de la part des Mouse On Mars. L’épilogue de cet album change la tendance en proposant des titres autrement plus originaux : le maintenant connu « That Sound Wiped », edit du titre fondateur sorti deux ans plus tôt et qui n’a rien perdu de son groove illuminé et de ses mélodies brillantes qui ressort comme un des grands moments de ce Tromatic Reflexxions. « Dearest Friends » clôt cet album sur une note positive grâce à ses sonorités hawaïennes et naïves sur lesquelles Mark E.Smith prend, une fois n’est pas coutume, le temps de se poser, pour offrir ce que sa voix sait faire de mieux, à savoir une vraie chansonnette désintéressée et décalée dans la plus grande tradition de The Fall.

Après seulement 48 minutes de son brut, on se relève difficilement de ce premier album tant les efforts déployés nous laissent la figure en sang, les sens aveuglés par un exercice malin et vicieux dont ces trois énergumènes sont devenus les maîtres à penser en l’espace d’un disque, et quand on sait que le groupe a signé pour trois albums, on peut s’attendre au pire, espérant seulement que nous aurons le temps et les moyens de nous préparer au deuxième round. La tornade Von Südenfed gagne par K.-O. physique, reste à en évaluer les dégâts.

Le goût des autres :
7 Nicolas