The Suburbs

Arcade Fire

Merge Records – 2010
par Julien Gas, le 10 août 2010
5

On les aurait cloués au pilori dès la première écoute tant le nouveau Arcade Fire nous semblait terriblement long et ennuyeux, malgré un premier single qui nous avait agréablement effleuré les oreilles quelques semaines plutôt. Un "Suburbs" pop sonnant terriblement Arcade Fire, terriblement convenu aussi. On savait qu'avec le groupe canadien, on devait laisser le temps aux chansons de révèler de véritables orfèvreries pop. Et des orfèvreries, The Suburbs en contient. Malheureusement, elles sont trop souvent noyées dans la mélasse d'un album trop long et grandiloquent qui hésite  entre pop indépendante créative et  hymnes FM.

Bien sûr, le coup d'éclat Funeral est encore dans tous les esprits, avec un « Rebellions (Lies) » converti en hymne du rock indé d'un groupe devenu, entre temps, féru de rock de stade. Parce que finalement, c'est cette transformation terriblement contre nature que l'on reproche à Arcade Fire sur The Suburbs, troisième album qui voit la bande à  Win et Régine passer du petit milieu indépendant et arty montréalais au Madison Square Garden de New York. On sent pourtant que les types s'accrochent à l'énergie d'antan, à la folie des débuts. Le fait d'organiser un concert à l'arrache sur un parking d'hypermarché  montre à quel point le groupe semble assis entre deux chaises ; et son nouvel album en est le parfait reflet.

Sur la première partie du disque, on retrouve ce qui nous faisait écouter les Canadiens en boucle il y a cinq ans : une énergie pure greffée à des instruments et des voix qui virevoltent dans la plus pure tradition Arcade Fire. Certes, rien n'a vraiment changé, et la trilogie « Ready To Start », « Modern Man » et « Rococo » a même l'avantage d'être un réel shoot de plaisir malgré son manque total de nouveauté. Le reste de l'album, moins percutant, s'égare quant à lui dans une pop indigne d'Arcade Fire, un truc qui vire au rock FM allant jusqu'à se donner des airs de Keane ou de Snow Patrol sur des titres comme « Sprawl I » ou « We Used To Wait ». La transformation est rude pour un groupe érigé en tête de file du rock indépendant mondial.

Et si on termine l'album la larme à l'œil, sur l'ultime sursaut qu'est « The Suburbs (continued) », c'est aussi en jurant que le rock indépendant est mort, que désormais, les Arcade Fire, Vampire Weekend et autres Grizzly Bear polissent tellement leur son qu'ils en perdent leur âme. Le débat est long et plutôt que d'argumenter pour ou contre un camp que l'on regrettera très vite, on réécoutera encore l'album d'Arcade Fire pour ne pas tirer trop vite sur l'ambulance. Qui sait, le travail d'orfèvre nous a peut-être filé entre les doigts...  

Le goût des autres :
3 Julien 7 Romain 7 Thibaut 8 Laurent 7 Maxime 7 Amaury L