Retrospective

Laurent Garnier

F Communications – 2006
par Jeff, le 2 octobre 2006
8

Dire que Laurent Garnier a marqué de son empreinte l'histoire de la musique électronique serait un doux euphémisme. Voilà bientôt quinze ans que celui que l'on considère (à juste titre) comme l'un des parrains de la techno en France roule sa bosse aux quatre coins du globe. Que ce soit lors de ses nombreux rendez-vous avec le Rex Club, derrière les platines de feu la Haçienda (sous le pseudonyme de DJ Pedro), à Détroit sur les terres de ses ancêtres ou aux commande de Radio Nova, le Français a toujours œuvré dans un seul et unique but: défricher, fédérer et enflammer avec des DJ sets frappés du sceau de l'éclectisme le plus brutal ou des concerts survoltés. Après le coffret Excess Luggage qui, en 2003 et sur cinq disques, faisait étalage des talents de maître de cérémonie du sieur Garnier, voici que débarque sur son label F Communications le sobrement intitulé Retrospective, un double disque qui se propose de non seulement rassembler les plus grands tubes du Parisien parus au cours de ces douze dernières années, mais également d'offrir une intéressante sélection de titres rares, de remixes ou de faces B.

Nouveau témoignage d'une science des rythmes appliquée sans relâche depuis ses débuts, cette rétrospective est le reflet parfait d'une carrière qui aura vu le Français enchaîner les voyages à vocation éducative et succomber par vagues successives à divers styles musicaux. Laurent Garnier est peut-être parisien, mais il pourrait aisément prétendre au statut de citoyen d'honneur de Chicago, Ibiza, ou Manchester tant les différents mouvements et courants qui sont nés dans ces villes se retrouvent tous sur Retrospective. Entre techno froide et mécanique ("Coloured City"), trance minimale et hypnotique ("Jeux d'enfants") ou batifolages discrets avec le jazz ("Acid Eiffel"), Laurent Garnier n'a jamais voulu résister aux tentations et s'est toujours laissé emporter au gré de ses envies et de la mode. Mais contrairement à cette dernière, le Parisien a su faire preuve de suffisamment de discernement et de talent pour que sa musique ne périclite pas une fois l'année écoulée. J'en veux pour preuve un titre comme le séminal "Crispy Bacon" qui, presque dix ans après sa sortie, continue de faire la joie de DJ's et des fêtards. Niveau raretés, le fan risque fort d'être comblé puisque ce sont pas moins de neuf titres inédits qui se retrouvent sur Retrospective. On retiendra notamment le génial et extatique "6 Months Earlier" (fruit de la collaboration entre Garnier et Llorca sous le pseudonyme de Marl Chingus), le remix colossal du "Demented" de Carl Craig, les versions live de "Acid Eiffel" et "Man With the Red Face" en compagnie du claviériste et jazzman norvégien Bugge Wesseltoft ou le vidéo mix de "Flashback" et ces passages parlés où on peut notamment entendre que « quand on est Français, on chante en français » (référence aux quotas d'artistes français imposés au radios et dans lesquels Laurent Garnier ne rentre pas).

Malgré un second disque plus sombre et tranchant forcément avec les assauts soniques de la première galette, cette rétrospective n'en reste pas moins une franche réussite et démontre à qui n'en avait pas encore conscience que l'univers de Laurent Garnier est d'une impressionnante richesse et que le Français est loin d'être le has been que certains voient déjà en lui. Respect.

Le goût des autres :
9 Julien