Portait with Firewood

Djrum

R&S Records – 2018
par Côme, le 13 septembre 2018
7

Pour bien appréhender la bass music, il est crucial de faire référence à la notion de 'hardcore continuum', ce concept selon lequel chaque sous-genre du mouvement serait directement apparenté à la culture hardcore anglaise du début des années 90. Loin d’une continuité aujourd’hui, on se dit que le paysage bass ressemblerait plutôt au serpent qui se mort la queue, préférant recontextualiser à l’infini son histoire que de tuer le père et bâtir sur les cendres. Il suffit de voir le succès (totalement justifié) du dernier Skee Mask pour constater qu’aujourd’hui la bass music a ses codes, ses règles, et ses légendes.

C’est dans ce cadre que vient s’inscrire le dernier disque de Djrum, Portrait with Firewood. Un album il y a 5 ans, une poignée d’EPs que seul le fan absolu de bass music a écouté et une signature sur le très connu (mais parfois très convenu) R&S Records, il n’en fallait pas plus pour imaginer une nouvelle pierre tombale dans le cimetière des éléphants. Perdu. Car loin des cuts cliniques et des breakbeats stériles, ce disque remet l’approche purement mélodique au cœur de la création et décide d’opposer à la rigueur d’un genre codifié le contrepied stylistique permanent. Et pourtant Djrum sait breaker ! Preuve en est sur ce magnifique "Creature Pt 2", associant voix tout droit sorties d’un disque de Burial, sound design digne d’un Objekt et un violoncelle pour habiter ce qui n’aurait pu être qu’un mélange d’influences indigeste.

Plutôt que les DJ tools et l’hommage permanent, Djrum repense continuellement ses influences, faisant même entrer du gabber par la grande porte sur un "Showreel Pt 3" aux allures de rave en aquarium. Mélange de mauvais goûts ? Pas vraiment, tant l’ensemble est ouaté, parfois étonnamment proche du modern classical en jouant constamment sur le piano et les atmosphères feutrées. Loin de la meute des prolifiques producteurs d’EP bass, ce disque boxe dans une tout autre catégorie, celui des disques électroniques cohérents et à écouter d’une traite. S’il fallait lui trouver un concurrent, on se prendrait presque à le comparer au Flatland d’Objekt, échangeant la rythmique clinique du disque de TJ Hertz pour gagner en beauté et en mélodisme. Vivement la suite.

Le goût des autres :
9 Louis