Poison Everything

Obliterations

Southern Lord – 2014
par Simon, le 6 novembre 2014
7

Certains disques sont comme des sucreries : on connait leur goût par cœur, et on pourrait en bouffer trois kilos qu’on aurait encore faim. Et bien le punk-hardcore, c’est ça. A moins de s’enfermer dans les mouvances technico-brutalo-techniques emmenées par des gars comme Converge ou The Secret, il y a beaucoup de chances pour que ton prochain disque de hardcore ressemble comme deux gouttes d’eau aux cinquante LP’s que tu possèdes déjà dans ta collection. Et à vrai dire, on s’en fout en peu, l’essentiel est ailleurs. Dans l’énergie plus que probablement, dans nos envies de goûter à la contestation sociale du fond de notre canapé moelleux. Entendre un chien brailler sur du punk gavé de grosses guitares reste un plaisir certain, depuis des années, et tant pis si le genre ne semble pas vouloir évoluer.

Poison Everything c’est ça et, en même temps, pas tout à fait. Obliterations est bien entendu un gros groupe de hardcore (qui s’inclut dans la volée de nouvelles signatures de Southern Lord, de The Secret à Nails en passant par Gust, Brotherhood ou Baptists), mais sa tendance à s’inscrire dans du old school à tout prix en fait un outsider généreux. Une attitude d’anciens qui se distancie par son aspect raw as fuck de la plupart des écoles auxquelles on a l’habitude de se référer : d’une part le New York Hardcore (Agnostic Front, Cro-Mags, Sick of It All ou Terror), et d’autre part tout ce qui a pu graviter de près ou de loin autour du mouvement skate-punk un poil vénère (les premiers NoFX, Minor Threat). Ici, on n’est pas sur le modèle de la célébration, de l’esprit de crew, du straight-edge et des mecs qui marchent en bande. Obliterations, ce sont des guitares qui envoient des larsens, des bagarres sans aucune dignité, des vestes en cuir virtuelles et l’haleine de whisky qui ne veut pas s’en aller le lendemain de veille.

En un mot comme un cent, Poison Everything c’est de la violence. Cette violence dénudée, qui ne se cache derrière aucun mythe ni valeur iconique (le NYHC est spécialiste dans le genre). Cette violence, c’est celle de groupe comme Black Flag, Discharge (le Hear Nothing See Nothing Say Nothing s’impose comme une influence majeure ici), Laughing Hyennas et tout ce que les années 80’s ont pu nous pondre dans le genre. Rajoute à cela des guitares maxi-burnées, pleins de larsens à la Unsane, du gros groove qui te donne envie de faire des caresses à tout ce qui passe et t’obtiens un produit calibré pour tes plus grosses déglingues dans des bars miteux. Et tant pis si ce disque est sorti vingt-cinq ans trop tard.

Le goût des autres :