Other Life

Sean Nicholas Savage

Arbutus – 2013
par Michael, le 5 juin 2013
7

Sean Nicholas Savage est un mec bourré de talent, c’est indéniable. Excessif et maniéré, le type qui en fait des caisses tout en restant sobre. Ou qui reste sobre tout en en faisant des caisses, c’est selon. Un mec qu’on devine extrêmement fragile et paradoxe là encore, sans aucun doute doté d’un ego de la taille d’une cucurbitacée de compétition, mais vu qu’il ne manque pas manquer d’humour, ça passe très bien. Le tout dans une gueule, un physique et une expressivité comme on en voit rarement et qu’on croirait tout droit sortis d’un vieux film des frères Coen. Enfin bon, regardez le clip de « You Changed Me » et vous comprendrez tout de suite.

Ce rouquin dégingandé qui nous vient de Montréal est en train de réussir avec ce deuxième album à mettre le pied dans la porte et s’attirer de plus en plus d’oreilles et de regards. Sa musique qui n’a pas grand-chose voire rien du tout à voir avec ce que l’on entend généralement en provenance de Montréal renforce encore ce sentiment de WTF qui vous fera immanquablement  arborer un sourire réprobateur qui voudra dire : « Non mais c’est quoi cette merde ? » avant de succomber petit à petit à ce qui revient à un beau petit hold up au pays du bon goût indé.

Car si on franchit très souvent la ligne jaune sur cet album qui peut évoquer tout ce qu’il y a de pire en matière de lounge music, il y a toujours quelque chose qui vous ramènera vers une réappréciation puis une totale approbation envers ce qui serait autrement immédiatement et sans ménagements jeté aux enfers de la musique indé. Et ce quelque chose peut se détailler en trois points : une voix, qui si elle est parfois aux limites de la justesse n’en est que plus touchante et vibrante, un sens mélodique très affuté et enfin des textes qui sous des aspects de scies sentimentales éculées qui sentent la vieille chaussette sont en fait imprégnés d’une noirceur et parfois même d’une cruauté assez terribles. En clair l’œuvre d’un vrai songwriter et interprète. Alors vous verrez, écoutez Other Life deux ou trois fois et il y a fort à parier qu’après une première impression proche de celle que peut provoquer l’ingestion d’une poutine faisandée, celle-ci se muera peu à peu en un de ces petits plaisirs coupables qui participent aux petites joies du quotidien.

Le goût des autres :
6 Tristan