One Foot In The Rave

Shitmat

Planet Mu – 2009
par Simon, le 24 mai 2009
6

L’homme le plus marrant et le plus décadent de l’Angleterre postmoderne est de retour. Si vous ne connaissez pas Shitmat, sachez qu’il est l’un des rejetons les plus méprisables que la génération rave ait engendré. Shitmat aurait pu s’appeler « Fuck You » ou « Suck My Rave » que vous n’y auriez vu que du feu : il représente la dégénérescence des couples consanguins qui forniquèrent dans ces interminables soirées axées jungle et drum’n’bass, là même où la drogue était plus légale que le pain blanc. Mais Shitmat est aussi un adepte des mash-ups les plus improbables, il l’a bien prouvé avec le bien nommé Hang The Dj où il s’amusait à faire chanter Sean Paul en version accélérée sur des rythmiques hardcore-gabber ( !?) ou chanter Donna Summer sur des flots d’acide brûlants.

Qui mieux que Planet Mu (hébergeant tous les déglingués de l’ère post-acid, dont le fameux Venetian Snares) pouvait donner une fois de plus la parole à un imbécile aussi talentueux que Shitmat alors qu’un énième retour de la rave s’annonçait dès le départ comme un suicide commercial. D’ailleurs One Foot In The Rave (annonce implicite d’un adieu musical ?) ne s’attache à aucune prétention quant au contenu qu’il propose : c'est un disque passéiste, ressassé et qui n’amène en aucune circonstance une pointe d’originalité à ce qui a déjà été relaté il y a quinze ans maintenant. Shitmat déroule une drum’n’bass remplie jusqu’au cou de réminiscences dancehall, couverte des pieds à la tête de gimmicks jungle teintés d’un breakcore pour minettes. Réjouissant non ? Eh bien oui en fait, car Shitmat vient de cette école où le beat est omnipotent, où l’amen break arrache les obstacles comme le vent souffle les feuilles sur son passage, ne laissant derrière lui qu’un sentiment partagé entre sourire en coin et terrassement auditif. C’était leur force, et ils ne se sont pas privés pour nous le faire savoir pendant plus d’une demi-décennie. Le son de One Foot In The rave est celui qui se jouait dans la première moitié des 90’s, celui qui faisait hurler des centaines de drogués dans les caves d’ « East London », rassemblés pour célébrer le dieu décadence et sa femme la princesse LSD. Quinze ans plus tard, le son est à prendre avec humour, mais Shitmat ne se laissera pas prendre de côté, ses titres annonçant déjà la couleur avant que vous n’ayez eu le temps de lancer le disque (« The Golden Age Of British Dance », « Best Before 10-11-1992 », « Archaelogy », Whitelabel Unity »).

Tout ce qu’il reste à faire pour vous, c’est prendre cet album brut de décoffrage en plein dans les dents, pour sentir une ultime fois les bienfaits d’une culture rave qui ne sera finalement jamais morte car comptant dans ses rangs bien trop de déglingués pour ne pas la soutenir encore et encore. One foot In The Rave est un disque facile et jouissif, un plaisir coupable comme l’Angleterre sait encore nous en donner plus d’une décennie après l’annonce nécrologique de ce paysage musical autrefois si vivifiant. Jouez-le fort ou allez vous faire foutre, voilà le credo.