On Oni Pond

Man Man

-Anti – 2013
par Jeff, le 29 octobre 2013
8

Dans la vie, tout est question de confiance. Pour arriver à ses fins, rien de mieux qu’une confiance en soi inébranlable, qui va influer sur la perception que se font les autres d’une pensée ou d’une action. Et c’est en connaissance de cause que parle l’auteur de ces lignes, interprète de conférence de profession. Un mec dont le boulot consiste à traduire vers le Français des propos souvent incompréhensibles (parce que éminemment techniques ou piètrement exposés par un orateur stressé), en donnant à la personne qui l’écoute l’impression qu’il y connaît quelque chose au caractéristiques techniques d'un rail de chemin de fer ou à la politique en matière de voies navigables intérieures. Il en va de même en musique: certains artistes dont la confiance n’avait d’égal que l’allant sont parvenus à nous vendre des concepts pourtant improbables ou foireux sur papier. Le rédacteur moyen doit quant à lui aussi transmettre une certaine impression de connaissance minimale du sujet histoire de ne pas perdre un lecteur qui déteste se faire donner la leçon par un apprenti journaliste qui n’y connaît au final que pouic.

Alors oui, de la musique, on en écoute à longueur d’année. Pourtant, il est des groupes à la carrière bien établie dont on oblitère purement et simplement l’existence, souvent par simple manque de temps. Man Man fait partie de cette catégorie. En effet, On Oni Pond est déjà le cinquième album du groupe de Philadelphie, mais le premier que j’écoute avec toute l’attention qu’il mérite. Un disque qui est d’ailleurs l’affaire de types qui ont certaine confiance en ce qu’ils font – ou donnent au moins l’impression de croire dur comme fer dans la pertinence de leur chipotages pop. Sur ce disque produit par ce bon vieux Mike Mogis (Bright Eyes, First Aid Kit, She & Him), on retrouve tout ce que l’on aime chez ces groupes indés américains qui n’ont peut-être pas pignon sur rue, mais qui ont tout pour devenir des chouchous du public – ce que semble être déjà le groupe quand on farfouille un peu sur la toile. Et si on laissera les aficionados de la première heure nos vanter les mérites des efforts précédents, on prendra On Oni Pond comme il vient, sans le moindre préjugé. Et dans cette analyse libérée de toute contrainte contextuelle, on lui trouve de nombreuses vertus à ce disque : débridé et foutraque certes, mais écrit suffisamment soigneusement pour ne pas se perdre en circonvolutions prout-prout, On Oni Pond oscille entre le joyeux, l’attachant, le naïf, le mongolo et le doux-amer. Avec à la clé un paquet de mélodies imparables et de singles potentiels.

Tout au long de ce nouvel album, Man Man tisse une indie pop sincère et malicieuse, qui s’articule autour de rythmiques légères et de refrains pour la plupart très catchy. Et ne se prend surtout pas au sérieux. Pas étonnant d’ailleurs qu’il soit comparé depuis ses débuts à Frank Zappa ou Captain Beefheart, deux références qui tombent sous le sens quand on écoute Man Man entasser les couches et maîtriser des ingrédients pas toujours faits pour se marier. Et dire que maintenant, il va bien falloir s’enquiller le reste de la discographie. En même temps, y’a pire comme corvée, au regard de la forme olympique affichée sur de nombreux titres…