Moonlight

Hanni El Khatib

Innovative Leisure – 2015
par Gwen, le 23 février 2015
6

"What would it sound like if RZA got in the studio with Iggy Pop and Tom Waits?" avait-il osé annoncer lors de son entrée en studio. Nous, ce qu'on préfère chez Hanni El Khatib, c'est sa dégaine de bad boy professionnel, son petit skateboard élimé par le sable de Venice Beach et cette désarmante confiance en lui.
Dans le fond, nous savons bien qui tu es, Hanni. Tu es l'équivalent musical de ce pote qui tape grossièrement dans ton porte-monnaie pour payer des tournées à tout le monde et qui ne te rendra jamais ton fric. Et qui squattera ensuite ton canapé. Pour une semaine tirant sur le mois. Malgré tout, nous continuons à faire appel à ta jolie gueule d'enfoiré de première. Parce que tu nous fais toujours bien marrer et que ton cirque vaut largement l'argent et l'énergie dépensés.

Quand on y repense, ton dernier Head In The Dirt nous a tout de même refilé quelques sueurs froides. Tu as abandonné sa production aux mains expertes de Dan Auerbach et la jouvencelle énamourée que tu étais l'a laissé te pousser sur le trottoir. Trop tartinées, tes chansons satisfaisaient une clientèle plus étendue mais rechignaient à embrasser sur la bouche alors que nous méritions un supplément de tendresse. Même si on observe encore les séquelles du passage d'Auerbach, il faut admettre que tu te rétablis plutôt bien sur Moonlight. Plus variée et sans aucun doute plus personnelle, la chose est bancale mais dégage la chaleur qui nous avait manqué sur ta précédente livraison. On y retrouve l'aspect semi-poisseux de tes débuts, ta tendance à exploiter les clichés rock'n'rolleux pour le meilleur comme pour le pire, les solos de guitare qui guettent la MILF à la sortie des écoles et l'attitude de couillon à mi-temps façon "j'en ai rien à branler mais file-moi tout de même ton numéro au cas où". Parfois, tu te montres franchement fainéant (le pataud "Melt Me"), parfois tu fais simplement semblant de l'être. C'est d'ailleurs dans ces moments-là que tu parviens à chier des merveilles sur le fil, juste avant que le carrosse ne se transforme en citrouille ("Worship Song", "Dance Hall"). 

Tu t'es bien lâché sur la réverbe, ceci dit. Il n'était pas nécessaire d'enregistrer tout l'album dans la salle de bain de Kim Kardashian mais comment t'en vouloir pour si peu. Le psyché est à la mode et il n'y pas de raison que tu ne grattes pas ta part sur la carcasse. On est également à deux doigts de te demander le nom de ton dealer parce que tu devais être fameusement perché pour conclure sur un morceau disco. Oui, oui, disco, mesdames, messieurs. Avec les violons, les clappements de mains et les reflets irisés de la boule à facettes. Nous aurions tant aimé te haïr pour cette traîtrise mais malgré tous nos efforts, nous n'y sommes pas parvenu. Alors, on te maudit, Hanni, toi et ta jolie gueule d'enfoiré de première.

Le goût des autres :
6 Yann