Looping State of Mind

The Field

Kompakt – 2011
par Jeff, le 26 octobre 2011
8

Si Bon Iver avait appelé son premier album While My Guitar Miserably Weeps (Deep In The Woods), on aurait bien rigolé de cette pleureuse barbue de Justin Vernon. Aussi, apprêtez-vous à vous payer gentiment la tronche d'Axel Willner, qui nous régale de bien belles galettes techno sous le nom de The Field depuis 2007. En effet, on connaît et on aime profondément le Suédois pour ses boucles infinies qui vous propulsent dans un état second, mais on imaginait qu’il n’oserait jamais intituler son troisième essai... Looping State of Mind!

Pourtant, si ce titre relève autant de la blague potache que du « mission statement » clair et net, il n'empêche que pour la première fois de sa carrière, The Field donne l'impression de nous offrir quelque chose d’un peu différent. Avec From Here We Go Sublime, Axel Willner enfonçait les portes de la perception avec sa techno crépusculaire, droguée et synthétique au possible. Mais lors de l’enregistrement de Yesterday & Today et sur la tournée qui a suivi, le Suédois a décidé de ne plus jouer la carte du simple duel avec les machines mais de se faire accompagner en studio et sur scène. Difficilement perceptible sur disque, cette évolution donnait sa pleine mesure dans l’exercice live, qui gagnait en puissance sans pour autant perdre sa finesse. Justement, preuve que The Field n’est pas le prisonnier de ses boucles infinies, certains titres de Looping State of Mind reflètent cette orientation prise en tournée, à l'image de l’inaugural « Is This Power » et de ses huit minutes de techno organique dopées par une section rythmique qui se la joue au naturel. Ailleurs, sur « Burned Out » notamment, c’est une voix lointaine et hantée qui prend progressivement le dessus sur la ligne de basse, comme pour démontrer avec emphase que Willner ne se soustraira jamais complètement aux machines.

Mais que les fans des interminables montagnes russes de From Here We Go Sublime se rassurent. En effet, Looping State of Mind contient également son lot d’hymnes techno dont on ne voit jamais le bout. Et à ce petit jeu, comment ne pas citer « Arpeggiated Love » et « It’s Up There », qui renvoient aux plus belles heures du premier album de l’estimé producteur suédois. Et finalement, une fois le disque terminé, la boucle bouclée en quelque sorte, on comprend qu’Axel Willner compte aujourd’hui parmi les artistes les plus essentiels de l’écurie Kompakt – et de la techno minimale par extension. De par sa capacité à trouver le juste équilibre entre respect des fondamentaux, expérimentation aussi discrète qu’essentielle et mutations inévitables, The Field se révèle d’une force tranquille à laquelle il fait bon se soumettre, voire s’abandonner.

Le goût des autres :