Let The Love Flow

Fuckpony

Bpitch Control – 2009
par Simon, le 10 novembre 2009
8

A première vue, Fuckpony aurait pu être la nouvelle égérie electro-trash comme on en produit à la chaîne chez Kitsuné. Car il faut bien le dire, avec un nom pareil, il est difficile d’imaginer que derrière ce pseudonyme un peu (beaucoup ?) ringard se cache l'un des plus grands héros de la nouvelle scène house. C’est qu’en fait Fuckpony n’est rien d’autre qu’un avatar de plus pour le très estimé Jay Haze, figure incontournable du nouveau courant house qui sévit dans les clubs du monde entier. Car si la house a pu être le vilain petit canard de la bande électronique au vu de son embourbement latent il y a de ça quelques années, on peut maintenant compter sur  Dixon, Âme, Henrik Schwarz et bien sûr Jay Haze pour remonter le niveau. Et comme une nouvelle production du monstre de Pennsylvanie est chose rare et précieuse, c’est le label Bpitch Control, qui accueille déjà Modeselektor, Ellen Allien, Paul Kalkbrenner et autres Kiki, qui décroche la timbale.

Ceux qui connaissent déjà les productions de Jay Haze (dans le cas contraire, il est toujours temps de se jeter sur son excellent mix pour la série Fabric) ne seront pas étonnés à l’écoute de ce Let The Love Flow car tous les éléments de la musique du Pennsylvanien se retrouve sensiblement dans cette nouvelle livraison : rythmique faussement nerveuse, science aboutie du clavier et chaleur sexuelle éprouvée. On tient donc là un hommage recomposé aux grandes heures de la house de New-York et Chicago. Mais vingt-et-unième siècle oblige, la musique de Jay Haze est un bel exemple d’effort postmoderne, sans doute est-ce dû aux rapprochements évidents avec la ville de Berlin, haut lieu de toutes les ardeurs électroniques. On ne sera donc pas surpris d’y croiser quelques alliages technoïdes ou l’une ou l’autre tentation minimale. Mais quoi qu’il en soit, Let The Love Flow reste le bastion d’un son chaleureux, amoureux : soul en somme. Et même jusque dans les moments les plus telluriques de l’album (prenons au hasard le très bien nommé « Orgasm On The Dancefloor Saturday »), la virtuosité des synthés assure en permanence la classe et l’audace du tout.

Mais la personnalité réservée et timorée de Jay est une belle aubaine pour risquer le coup des chanteuses soul-pop, histoire de vérifier qu’il est encore à la hauteur de ses mentors en chaise roulante. Et si c’est souvent dans cette étape que les moins talentueux se cassent la gueule, Fuckpony nous sort de son chapeau des ritournelles presque early-house du meilleur goût (« I Know It Happened », « Fall Into Me »). Bref, on ne voit pas vraiment ce qu’on peut reprocher en définitive à ce Let The Love Flow : son audace ? Certainement pas ; sa maîtrise des ambiances ? Encore moins. Car après tout, ce pseudonyme dégueulasse ne devrait pas nous faire oublier le géniteur premier du projet : Jay Haze is back, ça vaut bien un album irréprochable.

Le goût des autres :
8 Julien