Le regard qui tue

Varnish La Piscine

Colors Records – 2019
par Yoofat, le 6 février 2019
7

"Cette histoire n'est pas une histoire. Cette histoire est une expérience." Cette nuance n'est pas de trop pour appréhender au mieux Le Regard qui tue, le nouveau "film auditif" de Varnish La Piscine. À la fois réalisateur et producteur, acteur et rappeur, le membre de la Superwak Clique suisse (Slimka, Di-Meh, Makala) a de nouveau fait éclater son cerveau dans le seul but de nous divertir avec un objet qui emprunte autant à l'esthétique des séries B qu'à la fraîcheur des Neptunes

Esprit série B oblige, on n'est pas dans du David Fincher niveau scénario : Bonnie Banane, la chanteuse estampillée Grande Ville Records, est téléportée dans le Monaco des années 60. L'une des muses de Myth Syzer se mue en Gabrielle Solstice, femme d'une beauté Eva Longorienne et dotée d'un regard qui tue. Littéralement. Ses meurtres alertent les policiers monégasques et, parmi eux, le très loufoque Sydney Franco, interprété par Varnish La Piscine. Naturellement, les choses se compliquent lorsque ce dernier tombe amoureux de la femme qu'il est censé arrêter. 

Deux personnages, deux ambiances : si la piste de Gabrielle Solstice est belle et naïve, celle de Sydney Franco pue les ruelles sombres du New York de Ronald Reagan. Sur "Bad Boy", Varnish est épaulé par son meilleur partenaire au refrain, Makala, et rappe son couplet de flic ripoux avec la même hargne que celle d'un dealer de crack de The Wire. "Bon appétit à toutes les putes qui m'écoutent". Le reste des aventures de Gabrielle et de Sydney traduit une complicité amusante entre Varnish et Bonnie, entre rap et R&B, et une synergie dans la folie qui unit tous les personnages animant ce joyeux spectacle - on place un s/o tout particulier pour l'apparition venue de nulle part du grand Rico the Kid sur le remuant "FFFLASHBACK !!". 

Escape, précédent projet du producteur suisse, racontait l'histoire de Fred Koriban, un jeune homme qui, après quelques péripéties distrayantes, s'évadait d'un hôpital psychiatrique. Aujourd'hui, la folie de Varnish est bel et bien libre, circule sur les projets de ses amis (dont un est en couverture des Inrocks) et infiltre autant leur musique que leurs visuels. Il ne manque plus qu'un album de Makala produit par Pink Flamingo aka Varnish la Piscine et Genève pourra alors envisager de régner sur le rap francophone.

Le goût des autres :