La Di Da Di!

Battles

Warp – 2015
par Jeff, le 14 septembre 2015
6

Un seul être vous manque et c’est tout de suite un bordel monstre. Parce que derrière une communication plutôt bien verrouillée à l’époque, on a vite compris dans les interviews données par les membres restants que le départ de Tyondaï Braxton en 2011 était autant un choc qu’un crève-cœur. Comment pourrait-il en être autrement quand un ami claque la porte non pas parce qu’il ne peut plus supporter vos manies de starlettes ou vos grosses proutes flairantes dans le bus de tournée, mais parce que les divergences artistiques l’empêchent de s’épanouir au sein d’une entité dont on avait clairement l’impression que chaque membre contribuait au juste équilibre.

Et donc, trois longues années après l’immense Mirrored, disque-phare de la discographie de Battles, le groupe nous a pondu Gloss Drop, vendu comme une sorte d’album de la rupture et de l’ouverture vers des territoires plus pop. Un disque débordant de featurings qui cachaient mal le vide immense laissé par le départ de Tyondaï Braxton. Un disque incroyablement poussif et boursouflé – là où son penchant remixé, Dross Glop, valait lui le détour grâce au travail de gens comme Gui Boratto ou The Field. 

En 2015, Battles a survécu au traumatisme et est toujours bien arrimé au navire-amiral Warp, devenu une sorte de référence en matière de musiques expérimentales pour personnes qui n’écoutent pas de musique expérimentale. Et Battles de débarquer avec un quatrième album qui cache mal son parfum de désaveu, malgré un niveau de qualité retrouvé. Un désaveu, notamment parce Battles n’a pas choisi de repousser les limites de son post-math-rock, mais a préféré revenir à cette bonne vieille formule qui avait fait son succès. Une sorte de repli stratégique en somme. Un retour dans les pénates avec la queue entre les jambes si on veut être moins consensuel.

Cela n’empêche pas La Di Da Di! d’être un bon album, qui ne fera pas tache dans la discographie du groupe. Un bon album dont on pourra dire simplement qu'il est une version light et sans ambitions de Mirrored. La technique, la production et l’énergie y sont, il manque juste des ogives du calibre d’« Atlas » ou « Tonto » pour laisser une empreinte durable sur les fans ou les classements de fin d’année. Des titres comme « The Yabba » ou « Dot Com » tentent bien de contrer cet argumentaire mais rien n’y fait : on prend beaucoup de plaisir à écouter La Di Da Di! tout en se disant quand même que pour un groupe de l’ampleur de Battles, il manque un petit quelque chose. Ah ben ouais, Tyondaï Braxton.

Le goût des autres :
6 Michael 5 Yann