Hush

Asobi Seksu

Once Little Indian – 2009
par Julien, le 9 mars 2009
6

Si Laurent Gerra sortait un disque de morceaux originaux, écrits par lui-même, mais dans lequel il imiterait Daniel Balavoine de A à Z, vocalement comme instrumentalement, serait-ce encore un travail d'imitateur ou de véritable auteur-compositeur-interprète ? Cette question nous amène sans détour à faire le procès d'Asobi Seksu. Car le groupe new-yorkais fait aussi un étonnant exercice de mimétisme. Pas avec le chanteur de "l'Aziza", on s'en doute, mais avec les vénérables Cocteau Twins.

Il s'agit-là du troisième long-format de Yuki Chikudate (voix, claviers) et James Hanna (guitare) et pourtant jamais ils n'ont semblé si proches de leur modèle. Du chant très éthéré de Liz Frazer aux guitares bourrées d'échos de Robin Guthrie, toutes les mimiques du groupe culte de Treasure sont analysées, disséquées et reproduites telles quelles, clonées pourrait-on dire dans des compositions qui sont pourtant objectivement neuves. C'est bien simple, on peut mélanger dans une liste de lecture les titres de Hush et de n'importe quel Cocteau Twins des années 90, on n'y voit souvent que du feu. Au jeu des sept erreurs on peine à en trouver plus d'une : la différence de mixage d'une décennie à l'autre.

Qu'est-ce qu'on peut faire d'un disque comme ça ? Deux petites voix me parlent. Et l'une et l'autre me disent des choses bien différentes : détester ce truc, le considérer comme étant à peine de l'art, ou au contraire l'adorer comme si de rien n'était et en faire l'apologie – puisqu'on peut tout de même dire que cet album, pris pour lui-même, est brillant. Je ne vois aucune réponse valable sinon une toute molle. En disant que si vous ne connaissez pas les Cocteau Twins, que vous adorez par contre Blonde Redhead, la star asiatique Faye Wong ou l'ex-groupe de métal The Gathering, Asobi Seksu est une aubaine. Et que si vous êtes à l'inverse un habitué du genre, vous pouvez écouter Hush et surtout leur précédent, Citrus, beaucoup plus osé, parce qu'il est toujours bon d'entendre les sons qu'on aime. En gardant bien à l'esprit que si Laurent Gerra imitait Miles Davis avec une trompette en plastique, il n'en serait pas pour autant un génie du jazz.