How We Lost

Windsor for the Derby

Secretly Canadian – 2008
par Julien, le 17 novembre 2008
9

Dans le Marie-Antoinette de Sofia Coppola, à un instant des mélancoliques allées et venues de "l'Autrichienne", on pouvait entendre les premières notes de "Melody of a Fallen Tree" de Windsor for the Derby. C’était d’une incomparable poésie : le pouvoir de lévitation du morceau était total, et ce au même titre que les autres dinosaures du film : Kevin Shields, The Cure ou New Order.

New Order, en l’occurrence, a toujours fait figure de soleil pour le groupe emmené par Dan Matz et Jason McNeely. À l’instar des manifestes "Blue Monday" et "Age of Consent", Windsor for the Derby manipule boîtes à rythmes répétitives et guitares avec un égal bonheur. Le titre inaugural de ce huitième album, Let Go, est ainsi une longue dérive post-punk plongée dans des ruminations ambient. Si l’on retrouve là des sonorités directement tirées du catalogue Factory Records, l’humeur maussade – voire carrément dépressive – qui se dégage, elle, ne peut être inspirée du sourire retrouvé de Bernard Sumner après la tragédie Joy DivisionHow We Lost viendrait plutôt se loger dans la fumée des groupes shoegaze et noisy-pop, ressemblant tour à tour à Yo la Tengo (c’est criant sur "Maladies") et Slowdive ("Good Things" et surtout la splendide conclusion qu’est "Spirit Fade").

Avec un naturel confondant et une conviction sans faille, Windsor for the Derby traverse l’air de rien pas mal de scènes musicales. Chez eux, il n’y a pas de contradiction à partir d’une musique très minimaliste, limite slowcore  (je parle encore de "Let Go"), pour arriver en fin de parcours à des atmosphères bardées d’effets et de dissonances, où la batterie n'est plus que toms et où les mélodies surgissent de gros bouillons sonores. Cet enfoncement dans le magma rock, aussi discret que bien présent, fait d’How We Lost une véritable odyssée. Entre les deux versants du disque, sur "Forgotten", superbe pont suspendu tout en dépouillement acoustique, les quelques auditeurs égarés retrouveront leur chemin. Pas de risque, donc, tout le monde finira par trouver son compte sur cet album à la souplesse inespérée – loin de l’austérité qui marquait autrefois les Texans. Rien de bien original, me direz-vous, mais il est bien suffisant de porter ce précieux héritage indie-rock sur d’aussi larges et belles épaules.

Le goût des autres :
8 Romain