Greffes

Monique Jean

Empreintes Digitales – 2012
par Simon, le 7 mars 2013
8

Si on vous parle pour la première fois du label Empreintes Digitales, on en suit toutes les sorties avec une attention systématique. Pour comprendre cette confiance aveugle, il faut préciser que la structure est l’une des plus grandes références mondiales en matière d’électro-acoustique. Un comble quand on sait que la structure se contraint à ne recruter dans es rangs que des artistes canadiens. Une sorte de particularisme local qui a depuis longtemps étendu son écho au-delà de ses frontières nationales. Et pour cause, Empreintes Digitales ne sort jamais de mauvais disque. Si on ne connaît pas la moitié du quart des artistes présents sur la structure (à moins de vivre dans l’underground montréalais), tous ont en commun de justifier des curriculum vitae plus que pointus.

Car Empreintes Digitales, c’est avant tout un rassemblement de mecs bardés de diplômes en composition électro-acoustique. On est ici dans la frange « dure » du genre, celle qui fait la jonction entre les mathématiques appliquées et la stricte composition. Un catalogue qui peut paraître trop pieux aux profanes, mais qui devrait attirer l’attention – si ce n’est déjà fait – des amateurs de risque contrôlés.

Si on vous parle de tout cela, c’est parce que Monique Jean vient récemment d’apporter sa pierre à l’édifice. Et de bien belle manière. On la connaît peu, pour ne pas dire pas du tout, mais ce qu’on entend sur les cinq longues pièces de Greffes nous suffit pour la considérer comme une pièce essentielle de l’échiquier canadien du genre électro-acoustique. Rien que le « Givre » d’ouverture justifie à lui seul l’achat de ce DVD (ah oui, on a oublié de vous dire, la structure ne publie que sur ce format pour présenter ses travaux en configuration 5.1) : magnifique monstre de dix-sept minutes qui joue sur les infrabasses, les balises signalétiques et les micro-fractures pour transcender d’une magnifique manière cette première étude rigoureuse du son.

On pourrait d’ailleurs croire, à l’écoute de ce premier titre, que Greffes annonce un disque de bon écolier, ce qui est finalement loin d’être le cas. Car les quatre titres qui suivent optent pour une voie bien plus audacieuse (même si la maîtrise de « Givre » n’a rien de péjoratif), voire casse-gueule. Guitares préparées, clarinettes et saxophones formeront tour à tour les bases de titres plus ou moins longs, assurant à cet ensemble des atours organiques virulents, parfois noise et déroutants.

Quoiqu’il en soit, derrière revient la même maîtrise, permanente malgré cette volonté de vouloir sortir d’une image trop scolaire. Un très bon disque, qui appelle sans cesse la réécoute. Histoire de s’assurer qu’on n’en a pas fait le tour, que les interrogations sont là pour durer. Pour tous les amateurs de sonorités boisées.