Good Nature

Turnover

Run For Cover Records – 2017
par Alex, le 21 septembre 2017
6

En dévoilant Peripheral Vision, un irréprochable second album sorti en 2015, Turnover avait fait le choix payant de se détacher d’une étiquette pop-punk générique et à l’intérêt (très) limité, pour proposer un visage beaucoup plus sensible, quelque part entre indie, emo, dream pop et post-punk. Validée par la critique et les fans, cette nouvelle formule tellement plus captivante avait permis au groupe de s’imposer en quelques mois comme une valeur sure de l’indie US. De là à s’enfermer dans ses propres certitudes, il n’y a qu’un pas que Turnover semble vouloir franchir avec Good Nature, troisième long à nouveau sur Run For Cover Records.

Onze nouveaux titres forment donc ce nouvel album, tout aussi homogène mais dont l’atmosphère plus légère et lumineuse tranche avec la fragilité et la mélancolie qui se dégageait de son prédécesseur. C’est encore sous la houlette de Will Yip, nouveau gourou de la production punk / hardcore (Turnover jouit d’ailleurs d’un étonnant capital sympathie au sein de cette scène), que le trio de Virginie (sans le guitariste Eric Soucy parti pour une sombre histoire de harcèlement) s’est attelé à l’enregistrement de ce nouvel album inspiré de leurs nombreux voyages et récentes tournées aux quatre coins du globe. A l’image de cette pochette haute en couleurs, l’ambiance plus enjouée qui se dégage dès les premières secondes semble malheureusement être la seule évolution notable qu'ils nous proposent.

On retrouve tout au long de cet album des compositions mid-tempo, douces et apaisantes, des guitares cristallines sur lesquelles le timbre fragile et rêveur d’Austin Getz vient se greffer. De la reverb’ à gauche à droite, des mélodies touchantes avec toujours une pointe de vulnérabilité, une sensation particulière de réconfort mais finalement les mêmes mécanismes qui donnent l’impression que Turnover ne franchit pas de palier et semble tiraillé entre l’envie de proposer quelque chose de frais et celle de rester sur les acquis qui ont contribué à son récent succès. Si Peripheral Vision abordait des questions comme la rupture amoureuse ou la difficulté d’être en phase avec la société, Good Nature semble vouloir y répondre de manière plus sereine, plus optimiste, plus adulte, en jouant sur des sonorités plus aériennes et ensoleillées. Le bémol, c'est que cet album se révèle moins aventureux et rapidement répétitif. La qualité des compositions est suffisante pour empêcher l’auditeur de tourner en rond mais l’absence totale de risques ainsi que le manque d’épaisseur de certains titres n’en restent pas moins déplorables venant d’un groupe qui a su totalement se réinventer en deux albums.

Que dire si ce n’est que Good Nature est un album éthéré et relaxant, peu avare en émotions, mais dont le manque de versatilité, l’aspect très lisse et la relative similarité des morceaux qui le composent n’en font pas le disque que l’on aurait pu espérer. Un album moins audacieux mais dont la force réside dans sa parfaite cohésion et l’atmosphère apaisante, idéale en cette fin d’été, qui le parfume. Good Nature est une étape intéressante dans l’évolution du groupe mais il faudra toutefois proposer beaucoup plus sur la prochaine livraison pour éviter l’immobilisme.