Evidence

John Foxx and The Maths

Metamatic Records – 2013
par Simon, le 28 février 2013
7

John Foxx est un grand artiste, très grand même. Tellement grand qu’il faut remonter à 1977 pour croiser sa route pour la première fois. A l’époque et avec Ultravox, l’Anglais passe à tabac les ondes radios et se pointe en précurseur de la new wave qui sévira quelques années plus tard. Notre amour à nous c’est Metamatic, œuvre définitive de cold wave et de synth-pop qui lance de manière magnifique une carrière solo qui durera jusqu’au moment d’écrire ces lignes. Rien que pour Metamatic, cet homme valait bien un papier, car dans une époque où on se souvient surtout de Gary Numan et de Felix Kubin pour leur synth-pop d'avant-garde, John Foxx a su transcender en deux disques toute l’âme de cette musique de synthèse. Ayant intégré très rapidement les codes musicaux mis en place quelques années plus tôt (tout au plus un an ou deux si on s’en tient à la période Ultravox) par Kraftwerk, Metamatic concentrait en son cœur l’une des plus belles déclarations d’amour qu’on ait pu faire au synthétiseur-roi.

Vingt-trois ans, c’est une autre page qui se tourne. Après douze disques en solo, John Foxx prend la décision de rentrer à nouveau en collaboration, cette fois avec l’éminent Benge. C’est d’ailleurs tout sauf un hasard si on retrouve Ben « Benge » Edwards au côté John Foxx, lui qui incarne probablement l’une des plus belles collections de synthétiseurs du monde en plus d’en être le spécialiste avéré. Dix disques derrière lui, dont certains sous la forme d’œuvres strictement exploratrices voire fonctionnelles, et une réputation mondiale d’homme-machine attentif. Cette collaboration, c’est John Foxx And The Maths et Evidence est leur troisième réalisation commune. On reconnaîtra enfin qu’en choisissant Benge pour la co-réalisation de ses nouveaux disques, John Foxx fait un choix pertinent à bien des égards.

Outre les indéniables connaissances techniques que peut apporter un type comme Benge, celui-ci permet surtout à John Foxx de traverser le nouveau siècle sans trop se prendre la porte dans la gueule au passage. Car oui,  en 2013 le « tout clavier » est mort, du moins pas viable comme seul argument de vente, Kraftwerk a explosé depuis longtemps et les poses cold wave ne feraient peut être pas mouche comme elles ont pu le faire vingt ans plus tôt. Benge, c’est l’assurance d’avoir un produit qui ne fait pas tache, une œuvre qui permettrait de transposer les talents de John Foxx dans une dynamique nouvelle. Le résultat escompté est bien là, car du John Foxx ancien on retrouve toujours les élans à la David Bowie, les pulsions analogiques, les voix d’outre-tombes, les merveilles de claviers et la synthèse de ses comptines électroniques. Tellement qu’on en oublie toutes les adaptations rythmiques – jusqu’à voir Matthew Dear s’inviter sur un kick 4/4 sorti de nul part - le côté digitalisé et diaboliquement carré de la production. Tant mieux finalement, car à en juger par ce Evidence de toute bonne qualité, John Foxx a su trouver là le moyen idéal de mener à bien sa quête interminable de la musique à claviers sans jamais perdre en crédibilité ni en impulsion. Après trente-cinq ans de carrière et vingt-six albums studios on peut dire que le bilan est positif.