Ear Drums and Black Holes

Starkey

Planet Mu – 2010
par Simon, le 28 avril 2010
8

Entre le moment où nous défendions le premier album de Starkey et l'heure d'écrire ces lignes, le producteur de Philadelphie est réellement devenu une machine incontournable de l'entreprise dubstep mondiale – nous gratifiant au passage d'un excellent Goûte Mes Mix. Et force est de constater que cette renommée actuelle est toute à fait méritée quand on se penche un peu sur le dernier effort en date de l'Américain. Car si on aimait les atours parfois frontaux de Starkey, on se rend vite compte qu'avec les années ses qualités de production n'ont fait que croître, jusqu'à un Ear Drums and Black Holes en forme d'apogée.

Exit donc les bangers dubstep à gros renforts de peinture fluo, ici tout est millimétré, admirablement bien calibré dans des productions d'une synthèse poussée à l'extrême. En ce sens, Ear Drums and Black Holes est une merveille pour les oreilles, un bouquet de sons pour les yeux. Mais que les plus excités d'entre vous ne tournent pas directement le dos à notre producteur chéri, car, d'une certaine manière, le Starkey nouveau est bien plus puissant que l'ancien : alors que le son gagne sensiblement en précision, c'est tout l'univers du natif de Philadelphie qui gagne en dynamisme et en vivacité.

Toute l'Amérique est là : des featuring pro-crunk assumés au gigantisme des ambitions, on touche avec cette nouvelle sortie au must du dubstep glam. Celui là même qui brille sous le soleil de Venice Beach en attendant son heure pour une virée en club. Et venant de Philadelphie on se dit que dans ce club se joue surement de la grosse ghetto-tech baveuse, le genre de délire un peu nauséeux qui ne cesse de dégouliner des enceintes. C'est peut-être là que réside la force de Starkey : proposer un dubstep rempli à ras bord de claviers pour prostituées sans jamais tomber dans le côté vulgaire de sa ville, largement dominée par une fidget-house qu'on déteste. Une sorte de justesse où tout se jouerait en définitive : l'art d'en donner le maximum sans jamais tomber dans la singerie et le mimétisme malheureux.

Rien que pour ça, toute l'Angleterre du dubstep peut être reconnaissante de posséder un Américain aussi conscient. Avec moins de précautions, Ear Drums and Black Holes aurait pu devenir la bande-originale du prochain Fast and Furious mais il n'en est rien, ce nouvel album consacre tout le vent de fraîcheur qu'apporte Starkey à la scène dubstep mondiale, n'en déplaise à Joker ou Gemmy. Starkey est un Américain devenu Européen, faisant aboutir sa science du mélange sur quinze bangers intelligents et intelligibles, là où les Européens – fidèles éjaculateurs précoces du mouvement fidget – se damnerait pour devenir américains, ne se privant pas dès lors de se confondre dans la précipitation et l'ineptie de composition. Toute la différence est là entre les branleurs et les génies. Et tant pis pour les kidz.