Death Of A Typographer

Byetone

Raster Noton – 2008
par Simon, le 15 octobre 2008
8

Bien qu’en retrait derrière les autres cofondateurs du label Raster Noton (Alva Noto en tête), Olaf Bender, mieux connu sous son pseudonyme Byetone, n’en garde pas moins une position de force au sein de l’équipe: graphiste émérite, c’est à lui qu’appartient la lourde tâche de réaliser les pochettes des sorties du label, connues pour leur aspect ultra-minimal et leur efficacité visuelle sans pareil. Après avoir pondu un nombre restreint de productions pour le label (car souvent occupé à monter sur pied des visuels live détonants pour monsieur Alva Noto), Byetone se lance enfin dans une première entreprise musicale d’envergure, sobrement appelée Death Of A Typographer.

Et les intentions d’emblée posées dans « Plastic Star », maxi ô combien ravageur paru il y a peu, annoncent directement la couleur: une techno fluide et pourtant bel et bien massive, dirigée avec sobriété et sérénité. Premier constat qui saute aux yeux, Byetone sait concilier puissance dancefloor et minimalisme opaque sans que l’association ne paraisse lourde ou poussive. C’est que la texture presque industrielle du traitement donne ici une intensité rare à des titres bien souvent dépouillés, conférant à ces basses une richesse appréciable.

Le lien entre les qualités de graphiste d’Olaf Bender et celles de musicien saute dès lors directement aux yeux. Comme pour les pochettes qu’il réalise, Byetone jette sur ordinateur des lignes générales qui feront office de cadre pour les détails à venir. Détails qui respecteront scrupuleusement les bornes préalablement placées par notre architecte du son. Quel meilleur exemple que le diptyque « Capture This Part (Part I)/ Capture This Part (Part II) » qui représente à lui seul ce synthétisme méthodique qui caractérise l’album dans son entier: le champ d’action est d’abord soigneusement délimité par de délicates nappes d’ambient chargées de drones (Part I), nappes sur lesquelles viendront se poser avec délicatesse une pluie de beats techno rigides couverte par son lot de bleeps microscopiques, en parfaite adéquation avec ce qui précédait (Part II). La conséquence directe d’un tel travail de production est une cohérence de tous les instants, qui étonne quand on sait que le passage sur format long est une expérience neuve et encore vierge pour notre producteur.

On tient donc là un disque forcément de très haute tenue, qui concilie avec doigté les exigences d’une techno noble et fière et les particularismes liés à l’écurie pour laquelle Byetone a choisi de travailler (et donc l’orientation sonore qui en découle directement). Mais au-delà, comme pour le disque de Kangding Ray, Raster Noton crée avec Death Of A Typographer une nouvelle porte d’entrée pour permettre aux « non-initiés » de pénétrer avec plus d’accessibilité le cercle de ces producteurs de génie. Byetone gagne sur tous les plans sans rien lâcher pour autant, et ceci est assez peu courant pour être souligné. Essentiel.