Codes & Keys

Death Cab For Cutie

Atlantic – 2011
par Jeff, le 6 juillet 2011
6

Pour le scribouillard un tant soit peu conscienscieux, il y a quelque chose de profondément chiant à suivre la carrière d’un groupe comme Death Cab For Cutie. En effet, si on se doit de reconnaître au groupe américain un talent certain, celui-ci est aujourd’hui miné par une absence totale de remise en question doublée d’une présence médiatique en Europe qui confine au ridicule. Et qui fait ressurgir à chaque nouvelle sortie cette question lancinante : mais qu’est-ce qu’on va bien pouvoir dire au sujet de la musique de Death Cab For Cutie et qui n’ait pas été dit au sujet de Plans ou Narrow Stairs?

Car Ben Gibbard a beau essayer de nous faire croire qu’il a été influencé par le Another Green World de Brian Eno sur ce septième album, il ne faut pas de nombreuses écoutes de ce Codes & Keys pour comprendre qu'il porte plutôt mal son nom, et qu'il n'y a rien de bien codé ou cryptique ici. En effet, depuis Transatlanticism en 2003, la marge de progression du groupe a été aussi significative qu’une avancée dans des négociations israëlo-palestiniennes, et on a la légère impression que c’est le seul talent de composition de monsieur Zoey Deschannel qui a permis au groupe de continuer à bénéficier d’un capital sympathie inversement proportionnel à sa prise de risques. Certes, on pourra argumenter que ce Codes & Keys est le disque le plus expérimental d’un groupe (toutes proportions gardées, bien sûr) qui donne parfois l’impression de faire passer les claviers avant les guitares,  mais on se dit que la porte ouverte sur le précédent album par le gigantesque single « I Will Possess Your Heart » a oubliée d’être enfoncée - alors qu'une telle démarche aurait pu permettre au groupe de se débarrasser une bonne fois pour toutes de l’étiquettes « rockeurs pour adulescents sensibles ».

Pourtant, on vous l’a dit plus haut, derrière cette absence presque scandaleuse de surprises se cache toujours, en embuscade et prêt à dégainer, ce rusé renard de Ben Gibbard. Car si l’on est en droit de critiquer Death Cab For Cutie pour ses visées un peu trop consensuelles et son amour de la guimauve, il sera plus difficile de s’en prendre au songwriting du bonhomme. Et Codes & Keys vient bétonner un peu plus encore cette affirmation. Ce qui revient donc à dire que, malgré quelques chipotages électroniques, Death Cab For Cutie continue de faire du Death Cab For Cutie, et de le faire plutôt bien. Mais combien de temps allons-nous encore tolérer un tel immobilisme ?

Le goût des autres :
6 Laurent