Broken Bells

Broken Bells

Sony BMG – 2010
par Jeff, le 25 mars 2010
8

De James Mercer, on connaît sa capacité plutôt phénoménale à accoucher d'une indie pop à la classe folle au sein des indispensables Shins. De Brian Burton alias Danger Mouse, on connaît beaucoup de choses: il y a le background hip hop et ses collaborations avec le label Lex ou MF Doom, le désormais classique Grey Album ou Jay Z rencontrait les Beatles pour une étrange ballade ou la lucrative parenthèse Gnarls Barkley.

Mais ce que l'on apprécie par dessus tout chez Danger Mouse, c'est sa facilité à produire d'excellents disques de rock, notamment pour Sparklehorse, Beck ou The Black Keys. Et si, il y a encore quelques années, l'idée de voir Danger Mouse collaborer avec des barbus férus de guitare semblait assez inhabituelle tant le producteur américain semblait évoluer dans une galaxie davantage préoccupée par le beat, des disques comme Dark Night of the Soul ou Attack & Release nous ont démontré combien la vision du new-yorkais semblait faite pour s'exprimer avec toute la précision requise dans un carcan rock. Ainsi, en cette année 2010, on ne peut que se réjouir de le voir s'associer avec un artiste qui, a priori, partage peu ou pas de points communs avec lui, si ce n'est l'amour des choses bien faites et bien écrites.

A une époque où l'art de la collaboration a plus que jamais le vent en poupe et où la proportion de déchets ne fait que croître, il faut savoir séparer le bon grain de l'ivraie. Forcément, avec des zigotos aussi talentueux que James Mercer et Brian Burton, l'a priori est forcément positif, au même titre que le jugement final d'ailleurs. Car oui, sous ses apparences tranquilles et malgré l'absence de titres forts (des singles quoi!) en mesure de porter le disque sur les devants de la scène (les radios quoi!), ce premier du duo Broken Bells impressionne par son homogénéité et sa fluidité. En effet, avec des personnalités aussi fortes que James Mercer et Danger Mouse, le danger pour la montagne d'accoucher d'une souris était énorme. Mais le temps a plus que probablement joué en l'avantage de notre talentueux binôme: en effet, ce projet n'a rien d'une lubie d'artistes en proie à l'ennui. La genèse du projet remonte à 2004, lors d'une rencontre entre les deux hommes au festival danois de Roskilde. Ils ont depuis lors pris le temps de délimiter les contours de leurs univers avant d'enregistrer dans la plus grande discrétion les 10 titres qui composent ce premier album.

Ainsi, en mettant un peu d'eau dans leurs vins respectifs, Mercer et Mouse parviennent à façonner un pop éminemment soyeuse qu'il est bien difficile de comparer avec quelques têtes de gondoles d'aujourd'hui ou d'hier. En effet, qu'il s'agisse des Shins ou de Danger Mouse, nous sommes confrontés dans les deux cas à des artistes à qui l'on compare et que l'on ne compare plus à d'autres. Mais disons que si vous aimez le son ample et les basses bien en chair de Danger Mouse, à la croisée des chemins entre tradition et modernité, et que la douce voix et l'écriture tout en évidence pop de James Mercer fait des merveilles sur vos esgourdes, il y a peu de chances pour que vous ne tombiez pas en quelques écoutes à peine sous le charme de ce disque façonné avec amour, exécuté avec précision et savoir-faire et accueilli avec les félicitations qui s'imposent.

Le goût des autres :
8 Julien Gas