4REAL 4REAL

YG

Def Jam Recordings – 2019
par Noé, le 24 juin 2019
7

Un nouvel album de YG est toujours un évènement dans le monde du rap. Sauf que cette nouvelle livraison fait parler d'elle pour la plus triste des raisons : sa proximité avec la mort du grand Nipsey Hussle, qui a rejoint les trop nombreux rappeurs tombés sous les balles ces dernières années. Une mort prématurée qui, pour YG, sonne comme la perte d’un mentor et d’un frère à qui il dédie ce quatrième album studio, seulement quelques semaines après le drame. 

Initialement programmé pour le 12 avril, la sortie de 4REAL 4REAL a été décalée afin d’honorer la mémoire d'un Nip’ que YG décrit comme « his brother from an another color ». Un qualificatif qui, vous l’aurez sans doute compris, ne fait pas référence au taux de mélanine des intéressés : si YG a toujours roulé pour les Bloods, gang à la gâchette facile, Nipsey Hussle a longtemps chanté les louanges des Crips, leurs principaux rivaux pas forcément plus diplomates. Les deux bougres ne portaient pas le même maillot, mais partageaient au moins la même passion pour leur président et entretenaient une relation fraternelle que YG tente d’expliquer sur « My Last Words », son discours à l’enterrement de Ermias Asghedom. Un témoignage émouvant qui atteste de la complémentarité des deux piliers de la West Coast et dont les applaudissements viennent ouvrir « Hard Bottoms & White Socks », où le natif de Compton se positionne alors comme l’une des dernières têtes de gondole d’un gangsta rap californien qui ne triche pas : “Call Dre, Call Snoop, Call Game and Kendrick, too / When you think about the West it’s me and Nip, red and blue”.

Si la musique de YG peut paraître festive à bien des égards, le quotidien du gangster est dangereux et manque de lui faire perdre la vie en 2015 dans une fusillade dans ses studios de Los Angeles. Cet évènement déterminant dans l’existence du rappeur entraînera non seulement la sortie de l’un de ses meilleurs albums, mais marquera aussi le début d’une interminable chasse aux sorcières. Depuis, une légère tendance à la paranoïa accompagne la musique de YG, qui dénonce au passage toutes les personnes susceptibles de moucharder. Sur « Stop Snitchin », le gars de Compton s’en prend ouvertement et frontalement à 6ix9ine, affilié au Bloods et dont la simple évocation du mot « prison » a suffi pour qu'il se mette à table. Pour le reste, YG se fie aux vieux adages qui parlent de marmites, de soupes, de pots et de confiture et remplit le cahier des charges : basses qui ronflent, bangers de ride et prods de DJ Mustard. Le producteur est notamment à l’origine de l’excellent « Bottle Service » et du tout aussi bon « Go Loko », un single aux sonorités hispanisantes sur lequel on imagine déjà Arturo Vidal délivrer un tacle assassin en finale de Copa América. 

S’il n’a rien du coup de maître ou n'aura pas l'impact de My Krazy Life, 4REAL 4REAL, reste quand même un album convaincant qui, à défaut de faire oublier la mort d’une des plus grandes voix de la West Coast, permettra sans doute de pardonner le décevant Stay Dangerous sorti un an plus tôt. Au final, on espère simplement que YG tiendra la distance pour nous délivrer un dernier tour de piste et un finish qui lui permettrait d’avoir, lui aussi, droit à son victory lap.

Le goût des autres :
7 Ruben